"En Suède, François Fillon aurait démissionné dans les trois jours, voire dans la demi-heure !"
Certains journalistes étrangers s'interrogent sur l'attitude "jusqu'au-boutiste" de François Fillon. Comme Magnus Falkehed, correspondant suédois à Paris, qui n'imagine pas la même situation dans son pays.
Jamais la presse étrangère n'aura autant parlé de François Fillon que depuis ces derniers mois. En novembre, après avoir remporté haut la main la primaire de la droite face à Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, elle évoquait un "Thatcher français", "sérieux", "catholique assumé". Mais ces derniers jours, depuis qu'il est soupçonné d'emplois fictifs concernant son épouse et deux de ses enfants, le portrait dressé n'a rien à voir. "En Suède, il n'aurait pas tenu trois jours", explique à franceinfo Magnus Falkehed, correspondant à Paris du magazine Expressen.
Franceinfo : Comment les affaires qui visent actuellement François Fillon sont-elles perçues en Suède ?
Magnus Falkehed : Ce qu'on se dit, chez nous, c'est que la France a du mal à apprendre du passé. Ce n'est pas la première fois qu'un homme politique est soupçonné de mal utiliser l'argent public. J'ai beau vivre depuis une vingtaine d'années en France, je n'arrive pas à m'y faire ! Je ne suis pas le seul d'ailleurs. Quand je sillonne votre pays, je sens que les Français n'en peuvent plus. Malgré tout, rebelote, ça recommence régulièrement.
Ce genre d'affaires serait-il possible en Suède ?
Non, impossible. Simplement parce qu'on a des contre-pouvoirs qui fonctionnent bien. On sait en permanence où va l'argent public. N'importe quel citoyen y a accès. Ce n'est pas du tout une histoire de morale : le Suédois n'est pas plus honnête ou plus malhonnête que le Français. C'est juste qu'il y a des véritables contrôles. Quand un responsable suédois triche, il est vite démasqué, il n'a pas le temps d'aller très loin. Donc quand ça arrive, c'est une histoire de quelques sous, pas de centaines de milliers d'euros.
C'est donc tolérance zéro en termes de transparence ?
C'est même au-delà de la tolérance zéro. En Suède, on a déjà écarté du pouvoir une femme politique pour une histoire de barre de chocolat ! C'était au milieu des années 1990 : Mona Sahlin, qui était alors numéro 2 du gouvernement, a réglé quelques courses avec sa carte de crédit professionnelle. Elle a aussitôt remboursé, mais c'était déjà trop tard. Elle a dû démissionner, alors même qu'elle était pressentie pour devenir Premier ministre. Ça peut paraître excessif, mais pour les Suédois, c'était simple : si elle confondait sa carte bancaire de fonction avec sa professionnelle, alors elle n'était pas capable de diriger notre pays. Point barre. Mona Sahlin a ensuite connu une traversée du désert assez longue. Tout ça pour une barre de chocolat !
Le maintien de la candidature de François Fillon vous surprend-il ?
Ça me choque, surtout. En Suède, il aurait démissionné dans les trois jours, voire dans la demi-heure ! Et ça donnerait lieu à un grand nettoyage dans la foulée. Là, son attitude "jusqu'au-boutiste" m'interroge. Tout comme le silence de Penelope Fillon me surprend, d'ailleurs.
C'est-à-dire ?
Que c'est incompréhensible ! J'ai l'impression qu'on la traite comme si c'était une mineure arriérée, pas capable de parler. C'est elle qui est mise en cause pour des emplois fictifs, mais c'est son mari qui parle. En Suède, elle aurait été obligée de prendre la parole depuis bien longtemps. Et encore, je ne vois pas comment ce genre de polémique pourrait arriver chez nous. Parce que ça ne se fait pas d'embaucher sa femme ou un proche quand on est homme politique. Même si ce n'est pas interdit par la loi, personne ne le fait. C'est considéré comme irrespectueux de la fonction.
Le quotidien britannique The Independent a écrit que "ce genre de scandale est on ne peut plus normal en France". Partagez-vous cet avis ?
Il est clair que la France a un retard absolument dramatique au niveau de la transparence de la vie politique. Ça devrait pourtant être normal à une époque où l'argent public se raréfie. Ces affaires à répétition renvoient l'image d'une démocratie très imparfaite, qui est en train de nourrir un populisme dangereux. En clair, l'image que renvoie votre classe politique n'est pas très bonne, non.
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