Élections en Turquie : "Le profil des candidats de l'opposition a changé la donne"
L'opposition est particulièrement mobilisée dans les élections organisées en Turquie dimanche, estime sur franceinfo le journaliste turc Emre Demir.
Bien que "favori de ces élections" présidentielle et législative organisées dimanche 24 juin, le président turc Erdogan fait face à une opposition euphorique, juge Emre Demir, journaliste turc du site d’information Kronos
franceinfo : Recep Tayyip Erdogan pourrait-il perdre le pouvoir en Turquie ?
Emre Demir : C'est lui qui a fixé les règles, qui a choisi les dates, sauf qu'il y a deux mois, tout le monde était sûr qu'Erdogan allait l'emporter, et aujourd'hui, il est vrai que le profil des candidats de l'opposition, surtout Muharrem Ince, le candidat laïc, ou le nationaliste Meral Aksener, a changé la donne de l'élection. Il y a, effectivement, au sein de l'opposition, une mobilisation qui est beaucoup plus forte, si on compare, par exemple, au référendum constitutionnel de l'année dernière. Il y avait une atmosphère de peur, après la tentative de coup d'État. Aujourd'hui, elle n'existe plus. Il y a une sorte d'euphorie, même au sein de l'opposition. De toute façon, les opposants sont sûrs d'eux-mêmes. On va voir quels sont les résultats.
La situation économique, les prix qui flambent, l'inflation à 12% fragilisent la situation de Recep Tayyip Erdogan…
Effectivement. La Turquie risque une phase de dépression économique assez importante dans les prochains mois. C'était d'ailleurs l'une des principales raisons de ces élections anticipées : Erdogan voulait éviter cette dépression économique avant les élections, il voulait régler ce problème. Aujourd'hui, il paye très cher cette élection. C'est effectivement peut-être la raison principale qui explique cette mobilisation autour de l'opposition. La vie est très chère en Turquie, surtout le secteur de l'alimentation, qui a été fortement touché par cette crise et cela joue en faveur de l'opposition.
Quelle frange de la population est séduite par Recep Tayyip Erdogan, âgé de 64 ans ? La plus conservatrice ?
À peu près 25% de sa base électorale sont des conservateurs, qui vivent en Anatolie et qui sont une base solide de cet électorat. Il y a aussi des opportunistes qui veulent que le système actuel continue, qui pensent que ce sera le meilleur résultat pour l'économie turque, pour la vie politique. Donc, il y a à peu près la moitié de ses électeurs qui sont dans une logique pragmatique. Mais l'autre est effectivement une base assez solide qui votait auparavant pour le parti islamiste en Turquie. Mais, quand même, une bonne partie de son électorat peut changer de décision au fur et à mesure des résultats économiques. Ce sont deux logiques différentes.
Après la tentative de coup d'État en juillet 2016, des purges ont conduit des milliers de journalistes en prison. Comment les médias turcs couvrent-ils ces élections ?
Les médias indépendants en Turquie ont quasiment disparu de la scène. Il faut savoir qu'après le coup d'État, plus de 200 médias ont été fermés, il n'y a plus de diversité de l'opinion : aujourd'hui, il n'y a qu'une seule agence d'information, liée à l'État, et c'est elle qui va annoncer les résultats. À part quelques journaux comme Cumhuriyet, il n'y a plus de médias indépendants en Turquie. Nous vivons quasiment dans un monde parallèle, les médias turcs sont bourrés de désinformations avant les élections. Par exemple, juste hier [samedi] il y avait un meeting énorme, peut-être historique, pour l'opposition, à Istanbul, avec la participation d'au moins deux millions de personnes, mais aucune chaîne d'information n'a diffusé ce meeting. Les conditions ne sont pas du tout les bonnes pour les partis d'opposition. Plus de 3 000 journalistes ont perdu leur travail rien que l'année dernière. C'est tout un secteur qui a disparu en Turquie, aujourd'hui.
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