Suspension du financement à l'UNRWA : "Cela s'inscrit dans une longue tradition d'attaques, voire de calomnies contre cette agence", dénonce un ex-avocat de l'ONU
Sur franceinfo, Johann Soufi s'interroge de la "conformité" de cette décision "au-delà même de l'aspect moral et politique avec les obligations juridiques de ces États de prévenir un génocide".
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Johann Soufi, avocat spécialisé en droit pénal international, ex-responsable du département juridique de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) à Gaza entre 2020 et 2023, s'interroge ce lundi sur franceinfo sur la "conformité" de la décision de suspendre le financement de l'agence "avec les obligations juridiques de ces États de prévenir un génocide."
Plusieurs pays occidentaux, dont la France, ont suspendu leurs aides à l'UNRWA après les accusations d'Israël, selon lesquelles certains employés auraient participé à l'attaque du 7 octobre. Johann Soufi alerte sur l'impact "catastrophique" pour les Gazaouis si l'UNRWA cessait ses activités humanitaires. L'avocat oppose la "réaction extrêmement forte" des pays contributeurs et l'absence de réponses à des accusations encore plus graves de génocide de la Cour internationale de justice". Il rappelle que les accusations d'Israël "ne concernent que douze employés sur 13 000".
franceinfo : Comment expliquer que les pays contributeurs ont emboîté le pas aussi rapidement après les accusations d'Israël ?
Johann Soufi : Honnêtement, j'ai du mal à comprendre parce que je note une forme de dissonance entre la réaction extrêmement forte à des accusations très graves, effectivement, mais qui ne concernent que douze employés sur 13 000, et le silence et l'absence de réponses à des accusations encore graves de génocide de la Cour internationale de justice, le même jour, le vendredi 26 janvier. Il y a un silence et une absence de réponse de la communauté internationale en général, mais de ces États en particulier.
Même si des employés de l'UNRWA ont participé à l'attaque du 7 octobre, est-ce que cela nécessite sa fermeture ?
Non, bien évidemment. Ce qui est important, c'est premièrement de rappeler que c'est une agence des Nations unies qui compte 13 000 employés. L'agence a immédiatement pris une décision forte qui est de licencier les employés suspectés. Pour l'instant, ce ne sont que des accusations sur la base d'informations fournies par Israël. Deuxièmement, une enquête indépendante a été ouverte. Mais il ne faudrait pas, et malheureusement c'est le cas, que le comportement d'une infime minorité d'employés ou d'ex-employés affecte l'agence dans son ensemble et la population gazaouie tout entière, ce qui constitue une forme de punition collective.
Ce n'est pas la première fois que Israël s'en prend à une agence des Nations unies. Pourquoi cette hostilité ?
Cela s'inscrit d'ailleurs dans une longue tradition d'attaques, voire de calomnies contre cette agence. La raison est simple, c'est qu'aujourd'hui, on a un projet politique clair, qui est de transférer ou de déporter de force la population gazaouie pour, je cite les autorités israéliennes, "assurer la sécurité d'Israël". Ce projet qui est criminel ne passe que par la destruction ou la neutralisation de l'UNRWA puisqu'elle est en charge pour les Nations unies d'assurer le maintien de la population gazaouie dans ce territoire, voire d'assurer son droit au retour. Aujourd'hui, le projet politique passe nécessairement par la neutralisation de cette agence.
Combien de temps l'UNRWA pourrait tenir sans financements ?
Ce sera une coquille vide. Au lieu d'avoir politiquement dissous l'agence, ce qui, je le rappelle, ne devait se faire qu'à partir du moment où on avait trouvé une solution politique juste et durable à la situation des réfugiés de Palestine, et bien on aura d'ici quelques semaines une agence qui sera dans l'incapacité de fonctionner. Elle n'aura plus d'employés et ne pourra plus offrir une aide humanitaire à une population qui en a extrêmement besoin. La Cour internationale de justice a reconnu le risque imminent de génocide, et l'a fait notamment en raison du manque d'eau, de nourriture et de médicaments. Au-delà même de l'aspect moral et politique de cette décision, je m'interroge sur sa conformité avec les obligations juridiques de ces États de prévenir un génocide.
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