Uber, Deliveroo, Bolt… Ce que va changer la directive sur les travailleurs des plateformes numériques adoptée par le Conseil de l'UE
Les règles sur lesquelles se sont accordés les Vingt-Sept sont moins ambitieuses que la proposition de la Commission européenne, mais créeront une présomption de salariat pour les travailleurs.
Un accord politique a été trouvé, lundi 11 mars, par les pays de l'Union européenne (UE) sur une directive visant à renforcer les droits des travailleurs des plateformes numériques. Les négociations du Conseil de l'UE ont été difficiles et le texte final est bien loin de celui proposé par la Commission européenne en 2021.
Les dispositions concernent "28 millions" de travailleurs qui opèrent la plupart du temps sous le statut d'autoentrepreneur, comme les conducteurs de VTC ou les livreurs de repas, précise un communiqué du Conseil. Un statut dénoncé par les organisations syndicales européennes, qui défendent une requalification des travailleurs comme des salariés.
L'accord a été obtenu sans le soutien de la France, opposée au projet, et de l'Allemagne, où la coalition au pouvoir est divisée sur la question. La directive doit encore être adoptée formellement par le Conseil et votée par le Parlement européen. Les Etats membres auront ensuite deux ans pour l'intégrer dans leur droit. Mais que va-t-elle changer concrètement ?
Chaque Etat définira les contours de la présomption de salariat
Les Vingt-Sept se sont entendus sur la mise en place du principe de présomption de salariat pour les travailleurs des plateformes. La proposition initiale de la Commission européenne visait à mettre en place une liste de critères commune à toute l'UE, définissant clairement les liens de subordination entre une plateforme et ses travailleurs, rappelle Euractiv. Mais la version adoptée par les ministres de l'Emploi européens a en partie été vidée de sa substance.
Le texte final laisse une grande marge de manœuvre aux Etats européens. Ces derniers auront la responsabilité d'établir "une présomption de salariat dans leurs systèmes légaux" qui sera "déclenchée quand des faits de contrôle et de direction [des travailleurs] sont établis", précise le communiqué. La définition de ces "faits" sera établie par les Etats, en concordance avec leur "loi nationale et accords collectifs". Chaque gouvernement décidera donc des critères retenus. A titre d'exemple, dans son projet initial, la Commission européenne citait notamment "la limitation de la liberté d'organiser son travail" et "le contrôle de la répartition ou de l'attribution des tâches".
L'accord ne signifie pas que tous les livreurs et conducteurs des plateformes basculeront automatiquement sous le statut de salarié. Il prévoit cependant que les travailleurs des plateformes puissent contester leur statut, pour "accéder plus facilement aux droits dont ils bénéficient en vertu du droit de l'Union en tant que salariés", précise la Commission. "On a inversé la charge de la preuve, cela donne une arme nucléaire aux travailleurs pour enclencher une procédure aux prud'hommes pour requalifier leurs statuts", a réagi Brahim Ben Ali, secrétaire général de l'Intersyndicale nationale VTC et chauffeur chez Uber auprès de France 3 Hauts-de-France.
Une régulation des algorithmes utilisés par les plateformes
"Ce sera aux plateformes de prouver que [les travailleurs] ne sont pas des employés", explique la Confédération européenne des syndicats dans un communiqué, qui s'est réjouie d'une "victoire", estimant que "la fin du faux travail indépendant est à portée de main". Le lobby des sociétés de mobilité à la demande, Move EU, qui compte Uber parmi ses membres, a de son côté exprimé son mécontentement. "Il ne permet pas d'aboutir à une approche harmonisée dans l'ensemble de l'UE, ce qui crée encore plus d'incertitude juridique", a déclaré le président de l'organisation, Aurélien Pozzana, cité par l'AFP.
L'accord comporte également un chapitre visant à réguler la gestion algorithmique du travail par les plateformes numériques. Ces outils permettent "d'automatiser certains aspects de la coordination des travailleurs, par exemple en matière de répartition des tâches et de suivi des performances", explique le site Le monde de l'informatique. Avec les nouvelles règles, l'utilisation de certaines données, notamment l'état psychologique, la religion, la sexualité et les conversations privées des travailleurs seront interdites.
L'accord précise également que des décisions influencées ou prises directement par un algorithme sur les sujets de rémunération, de suspension de compte ou d'interdiction de travailler devront être supervisées par une personne, souligne Euractiv.
À regarder
-
Nouveau Premier ministre, retraites : les temps forts de l'interview de Sébastien Lecornu
-
Lennart Monterlos, détenu en Iran depuis juin, a été libéré
-
Charlie Dalin : sa course pour la vie
-
La mère de Cédric Jubillar se dit rongée par la culpabilité
-
Le convoi du président de l'Équateur attaqué par des manifestants
-
Le discours de Robert Badinter pour l’abolition de la peine de mort en 1981
-
Pourquoi les frais bancaires sont de plus en plus chers ?
-
Oui, en trois ans, le coût de la vie a bien augmenté !
-
Pas de Pronote dans ce collège
-
Robert Badinter : une vie de combats
-
Disparition dans l'Orne : la petite fille retrouvée saine et sauve
-
"L’antisémitisme est devenu une mode", déplore Delphine Horvilleur
-
"Une pensée de l'espoir" nécessaire pour Delphine Horvilleur
-
Ils ont le droit à l’IA en classe
-
"Il y a un monde politique qui est devenu dingue. Il est temps que ça s’arrête. Ça va rendre fou tout le monde"
-
Pouvoir d'achat : les conséquences d'une France sans budget
-
Emmanuel Macron : le président lâché par les siens
-
Sébastien Lecornu : "Les ministres (...) n'auront pas le droit à des indemnités"
-
7-octobre : la douleur des Israéliens
-
Élection presidentielle anticipée ? La réponse de B. Retailleau
-
Tirs de kalachnikov : la balle frôle la tête d'une fillette
-
La dépénalisation de l'homosexualité, l'autre combat de Robert Badinter
-
Des mineures pr*stituées issues de l’ASE
-
Mistral AI : la pépite française qui défie les géants de l'IA
-
Il part à la chasse aux polluants
-
Dissolution, cohabitation... 5 scénarios pour sortir de la crise politique
-
Goncourt des lycéens : et toi, tu lis quoi ?
-
Bernard Pivot à Robert Badinter : "Si Dieu existe, qu'aimeriez-vous qu'il vous dise ?"
-
Exclusif : à bord du premier cargo à voile
-
Instabilité politique : du jamais vu sous la Vè République
Commentaires
Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.
Déjà un compte ? Se connecter