Egypte : mobilisation après la mort d'une femme tuée par des policiers
L’image de sa mort a fait le tour du monde. Shaimaa el-Sabbagh a été tuée au Caire le 24 janvier à la veille de l’anniversaire de la révolution égyptienne. 4 ans après, ils sont encore quelques centaines à braver les interdictions de manifester pour réclamer la démocratie.
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Shaimaa el-Sabbagh, trentenaire active, mère d’un petit garçon de 5 ans et révolutionnaire de la première heure avait emmené une large couronne de fleurs. En cette journée ensoleillée, elle rejoignait un cortège d’une petite trentaine de personnes sur Talaat Harb, place centrale du Caire pour faire une marche jusqu’à Tahrir en hommage aux quelques 800 martyrs du 25 janvier 2011. Mais face à des forces de police sous tension en cette veille d’anniversaire de la révolution, elle n’en a pas eu le temps.
En plein après-midi, la militante s’écroule dans les bras d’un ami après avoir reçu plusieurs tirs de chevrotine dans la nuque, tirés par la police qui disperse et arrête rapidement le reste du groupe.
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Ce vieil homme, témoin de la scène, est en pleurs. Il est soutenu par un ami de la jeune femme, également présent quand la police a attaqué. "Le secrétaire de notre parti était avec la police, elle lui a dit 5 minutes, seulement pour 5 minutes, mais le général, c’est shoot ! Après ça on voit Shaimaa sur la terre…"
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Tu as entendu le général dire tirez ?
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Oui, tirez oui…"
Shaimaa était membre de l’Alliance populaire socialiste, un mouvement révolutionnaire qui avait choisi de braver l’interdiction de manifester et de se rassembler la veille du 25 janvier, pour ne pas être assimilés aux Frères musulmans qui avaient appelé à descendre dans la rue le Jour J.
Le lendemain de son décès, le bureau du parti s’est réuni pour rendre hommage à la jeune femme et dénoncer les pratiques désuètes des autorités. Khaled Daoud est le porte-parole de l’alliance populaire socialiste :
"La situation est dramatique, et nous mettons en garde, régulièrement les autorités. Si l’actuel ministère de l’Intérieur et le régime pensent qu’ils peuvent gouverner le pays de la même manière que le faisait Moubarak, ils se trompent totalement."
Après cet évènement tragique, d’autres groupes de militants, comme le mouvement du 6 avril ont finalement décidé de battre le pavé en cette date symbolique. Une journée qui a vu se tenir de nombreux rassemblements, de révolutionnaires mais aussi d’islamistes, dans des cortèges séparés. Une journée émaillée par les violences. 21 personnes ont perdu la vie, 516 ont été arrêtées.
Ces incidents, largement couverts par la presse, ce qui n’a pas été au gout des autorités égyptiennes. Au lendemain des évènements, elles ont convoquées les journalistes pour les "recadrer" en affirmant que les images capturées, notamment lors de la mort de Shaimaa el-Sabbagh avaient été manipulées.
Une hypothèse, réfutée par Islam Ossama. Il est le photographe à l’origine du cliché montrant la militante en train de mourir. Depuis, il affirme être traqué par les autorités : "Des hommes m’ont poursuivi dans la rue le jour où j’ai pris la photo, je ne sais pas qui ils sont, sûrement des policiers en civils qui voulaient me confisquer la photo avant publication. Puis l’avocat en charge du cas de Shaimaa m’a appelé pour me prévenir. Il m’a dit de partir de chez moi et de ne plus aller travailler car les autorités me cherchaient. "
Mobilisation des femmes
Face à l’étau qui se resserre de plus en plus durement sur la population, près de 200 femmes ont décidé, elles aussi, de descendre dans la rue pour rendre hommage aux victimes des violences policières et dénoncer le régime liberticide d’Al-Sissi.
Asma a pris part au rassemblement : "Ça fait deux ans que je n’étais pas descendue manifester, mais ils nous poussent, ils font le pire pour que nous nous retrouvions une nouvelle fois dans la rue."
"Les policiers sont des voyous !" scandent ces femmes. Heba, rose à la main, veut elle aussi faire entendre sa voix.
" J’ai vu la police tuer des gens avant, et je ne vais pas rester silencieuse face à ce qu’il se passe. Ces gens ont des familles, des gens qui les aiment, et c’est vraiment injuste d’être tué comme ça. Aucun policier n’est jamais arrêté, ou accusé de quoi que ce soit, c’est une blague !"
4 ans après la révolution, les droits fondamentaux en Egypte n’existent toujours pas, Amnesty International évoque plus de 40.000 prisonniers politiques. Dix-sept journalistes sont emprisonnés pour avoir exercé leur métier, le nombre de civils tués lui, est incertain mais augmente tristement chaque vendredi dans des face-à-face avec la police.
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