Déchets urbains: une gestion laxiste qui fait des ravages en Afrique
L’accident meurtrier survenu le 8 septembre 2016 dans une décharge de produits avariés près de Cotonou au Bénin est venu rappeler une triste réalité. Malgré quelques initiatives enregistrées ici et là, le laxisme persiste dans la gestion des déchets urbains en Afrique. Plusieurs villes croulent sous des montagnes de détritus. De nombreuses capitales sont classées parmi les plus sales du monde.
Une vingtaine de morts et des dizaines de blessés. C’est le bilan de l’explosion qui a dévasté une décharge d’enfouissement de produits avariés près de Cotonou, au Bénin.
Le président Patrice Talon a tapé du poing sur la table. Il a promis des poursuites contre les responsables de cet accident qui s’est produit en plein jour.
«Une entreprise de la place était venue déverser de la farine de blé avariée et l’a aspergée d’essence avant de mettre le feu», a expliqué un porte-parole de la police.
Un témoin raconte ensuite comment la population s’est jetée sur des zones de la décharge qui ne brûlaient pas pour s’approvisionner en farine quand une explosion s’est produite.
«Le dépotoir semble chatouiller les nuages»
Dans plusieurs pays du continent, les populations se débrouillent pour se débarrasser de leurs déchets dans des décharges à ciel ouvert. Les dépotoirs sauvages prolifèrent. C’est le cas dans la ville de Conakry, la capitale guinéenne, classée par le magazine Forbes parmi les villes les plus sales d’Afrique.
Sur mondoblog, un bloggeur guinéen a décrit le spectacle auquel il a assisté dans le quartier dit «concasseur» dans la commune de Dixinn en plein cœur de Conakry. «A l’image d’une montagne, le dépotoir de Concasseur semble chatouiller les nuages. L’odeur qui s’y dégage est épouvantable. La première fois que je me suis rendu à cet endroit, je n’en revenais pas.»
Les habitants de la capitale guinéenne ne décolèrent pas. Ils vivent dans des quartiers devenus des décharges à ciel ouvert. La ville croule sous les amoncellements de déchets, dans l’indifférence totale des autorités, se plaignent-t-ils.
Des détritus qui bloquent les voies ferrées
La démographie galopante dans les villes africaines a fait d’énormes dégâts. De plus en plus peuplées, de nombreuses cités croulent sous les ordures qui s’accumulent partout, y compris près des villas de luxe qui jouxtent les bidonvilles.
A Luanda, la capitale angolaise, les habitants ont pris l’habitude de jeter leurs déchets dans les rigoles des trottoirs, les bouches d’égout et les fossés. Faute de ramassage, les riverains y mettent le feu.
Le ras-le-bol s’exprime sur les réseaux sociaux où les jeunes se prennent en selfie devant des décharges de plusieurs mètres de haut ou devant un amoncellement de détritus qui bloque les voies ferrées, provoquant des retards de circulation de trains, rapporte l’AFP. La population se plaint des rats, des cafards et des mouches qui prospèrent autour de ces déchets.
«Nous ne pouvons plus continuer ainsi, sinon nous serons obligés de déclarer l’état de catastrophe sanitaire», a averti le nouveau gouverneur de Luanda nommé récemment par le gouvernement. Par mesure de précaution, il a fait placarder dans la ville d’immenses panneaux qui rappellent les gestes à suivre pour prévenir le choléra.
Dans le classement 2015 réalisé par le magazine Forbes qui dresse la liste des 25 villes les plus sales du monde, 16 d'entre elles se trouvent sur le continent africain. Dans tous ces pays, les décharges sont souvent incontrôlées et des matériaux toxiques s’y trouvent, notamment des équipements électroniques et chimiques qui sont jetés au milieu des ordures ménagères.
«Ces pays n’ont pas de système de taxes ou de redevances qui leur permettraient de financer des programmes de gestion des déchets solides, et leur population se débarrasse généralement de ses ordures dans des décharges sauvages, à ciel ouvert», note Ede Ijjasz-Vasquez qui a fait une étude sur ce sujet pour la Banque Mondiale.
Le plastique, ennemi public N°1
Des associations se sont mobilisées aux quatre coins du continent pour dénoncer le laxisme des pouvoirs publics.
Leur campagne de sensibilisation porte notamment sur l’interdiction de l’usage des sachets en plastique qui obstruent les ruisseaux, bouchent les canaux de drainage des eaux usées et dévastent les troupeaux. Au Sahel, 30% du cheptel meurt après en avoir consommé.
Plusieurs pays comme le Sénégal, le Gabon, le Cameroun, le Togo, le Burkina Faso, le Mali, la Côte d’Ivoire et le Rwanda ont d’ores et déjà interdit la production et l’importation du plastique.
Le Rwanda fait figure de bon élève en la matière. Là-bas, on vous débarrasse de vos sacs en plastique dès votre arrivée à l’aéroport de Kigali en échange de sacs en papier. Les autorités ont par ailleurs mis en place plus de 60 compagnies chargées de la collecte et du transport des déchets dans la capitale. Le tout sous la supervision de l’agence rwandaise de régulation qui fixe le prix à payer par chaque foyer dans les quartiers. Et ça marche.
Des initiatives similaires voient le jour dans d’autres capitales africaines comme à Ouagadougou au Burkina Faso. Mais tout le monde s’accordent à dire que rien ne sera fait sans une véritable volonté politique des Etats et une vaste sensibilisation des populations qui doit commencer par les plus jeunes dans les écoles.
Pour les spécialistes, les déchets ne doivent plus être considérés en Afrique comme des matériaux sans valeur, mais plutôt comme une ressource que le monde des affaires peut valoriser, en les recyclant sous différentes formes.
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