"On célèbre les médailles, mais on démantèle les parcours"... Teddy Riner et des athlètes dénoncent la fin du cursus pour les sportifs à Sciences Po Paris

Ce collectif d'une centaine d'athlètes, anciens élèves, s'est insurgé sur les réseaux sociaux, mercredi, contre la suppression de cette formation qui leur permettait de conjuguer études et sport de haut niveau.

Article rédigé par Apolline Merle
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le président de la République Emmanuel Macron décerne au judoka, quintuple champion olympique Teddy Riner, l'Ordre national du mérite lors de la Parade des champions, à Paris, le 14 septembre 2024. (SARAH MEYSSONNIER / AFP)
Le président de la République Emmanuel Macron décerne au judoka, quintuple champion olympique Teddy Riner, l'Ordre national du mérite lors de la Parade des champions, à Paris, le 14 septembre 2024. (SARAH MEYSSONNIER / AFP)

Les anciens élèves montent au créneau. Une centaine de sportifs de haut niveau français, parmi lesquels Teddy Riner, Sarah Ourahmoune, Michaël Jérémiasz, Marie Bochet, Arnaud Assoumani, Stéphane Houdet, a publié, mercredi 18 juin, un communiqué pour protester contre l'annonce de Sciences Po de supprimer le Certificat sportif de haut niveau (CSHN) de Sciences Po Paris progressivement "d'ici 2027". Le dernier recrutement pour cette formation, comptant une cinquantaine d'élèves, a été effectué en juin 2024 et ne sera pas renouvelé. Cette dernière promotion aura donc jusqu'à 2027 pour valider son diplôme. 

Ce programme, réservé aux athlètes de haut niveau, permet de conjuguer performance et savoirs afin d'anticiper l'après-carrière, grâce à un double projet. Cela leur offre une grande flexibilité comme celle de suivre les cours à distance, d'adapter les cours et les examens en fonction des calendriers sportifs ou encore la possibilité de pouvoir étaler la formation sur plusieurs années.

"À l'heure où la France vient de célébrer les Jeux olympiques et paralympiques [de Paris 2024] les plus beaux de l'histoire, c'est une institution de référence qui choisit... de couper les ailes de ses propres champions, sous la nouvelle direction générale de Sciences Po Paris", est-il écrit dans le communiqué. De son côté, Sciences Po Paris nous précise que "la décision de mettre fin au certificat sportif de haut niveau a été prise en 2023 [par l'ancien directeur Mathias Vicherat] suite à une évaluation du programme qui révélait une inadéquation de la formation aux profils hétérogènes de ces sportifs (diversité d’âges, de niveaux scolaires, de projets, de revenus)."

Un "abandon" des champions post-JO

Mis au courant, les anciens athlètes du programme avaient écrit à la direction de Sciences Po Paris, le 25 avril dernier, afin de solliciter auprès de Luis Vassy, nouveau directeur de Sciences Po, "un dialogue" pour "discuter des possibilités de maintien de ce programme unique, porteur de cette singularité et de cette excellence si chères à votre école, à notre école", ont-ils écrit. Selon les athlètes signataires, tous passés par cette formation et qui parlent "d'abandon", ce retrait "va à l'encontre des discours portés par le président de la République, de la ministre des Sports, les fédérations et le mouvement sportif. Il incarne ce paradoxe français : on célèbre les médailles, mais on démantèle les parcours.

Si le Collectif étudiants et alumnis du CSHN avait bien été reçu, la direction n'a pas changé son fusil d'épaule. En revanche, l'école parisienne, "qui place l’excellence dans le sport comme une des expressions de l’excellence, souhaite évidemment continuer à accompagner au mieux ces sportifs de haut niveau en leur proposant des parcours de formation et de reconversion adaptés et personnalisés", a assuré Sciences Po Paris auprès de franceinfo: sport. L'école a, par ailleurs, affirmé qu'un travail sera effectué "d'ici l'été avec les acteurs institutionnels du monde sportif pour proposer un dispositif académique pour la reconversion de ces sportifs, à la hauteur de leur engagement dans des sports de haut niveau qui font l’honneur de la France."

Plus de 250 athlètes diplômés

"Certains évoquent d'autres programmes [en alternative] comme le Bachelor Hepta [une sorte de partenariat entre l'ESSEC, CentraleSupélec et Sciences Po] pour justifier ce retrait, s'insurgent les athlètes anciens élèves. Mais cette alternative n'en est pas une. Elle est inaccessible pour beaucoup : 15 000 euros l'année, sans aménagement d'emploi du temps. L'impensable pour le haut performeur." Selon nos informations, le CSHN était financé par deux partenaires de Sciences Po Paris, la FDJ et la BNP, et permettait à 50% des athlètes de ne payer que 200 euros de droits d'inscriptions.

"Faut-il rappeler que 40 % des athlètes qualifiés pour les Jeux de Tokyo vivaient sous le seuil de pauvreté ?", insistent encore les signataires. En revanche, aux Jeux de Paris 2024, aucun sportif engagé lors des Jeux de Paris ne vivait sous le seuil de pauvreté, selon l'Agence nationale du sport (ANS). Néanmoins, les signataires rappellent que les programmes dédiés aux sportifs de haut niveau sont "rares. Ils doivent se cumuler, pas être remplacés". "Créé en 2007 sous la direction de Richard Descoings, le Certificat sportif de haut niveau de sciences Po Paris a permis à 260 sportifs de haut niveau olympiques, paralympiques et danseurs de l’Opéra de Paris, de conjuguer l’excellence sportive et artistique, à un parcours académique riche et exigeant", souligne encore le Collectif.

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