L'intelligence artificielle est-elle une menace pour notre alimentation en électricité ?

D'ici 2030, la consommation électrique des infrastructures nécessaires à son développement sera multipliée par trois. Il s'agit des fameux datacenters ou centres de données.

Article rédigé par franceinfo
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  (J?R?MIE FULLERINGER / MAXPPP)
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Va-t-on s'éclairer à la bougie à cause de l'IA ? Le groupe de réflexion Shift project, créé par Jean-Marc Jancovici, lance le débat dans un rapport publié mercredi 1er octobre. Si le rythme de développement de l'intelligence artificielle continue sur sa lancée, la production d'électricité aura du mal à suivre avec un risque de lourdes conséquences. Car les IA ont besoin de centres de données, ces fameux data centers. Ils sont très nombreux et aussi très gourmands en électricité.

Dans son rapport, le Shift project regarde d'abord du côté de l'Irlande. Dans ce pays, une politique fiscale favorable a attiré de nombreux data centers et la consommation électrique de ces centres de données est passée de 5% de l'électricité du pays en 2015 à plus de 20% aujourd'hui. Il a donc fallu faire des choix difficiles, notamment autour de Dublin et arrêter certains programmes immobiliers parce qu'on ne pouvait pas tout alimenter. L'opérateur irlandais EirGrid a fini par refuser de raccorder de nouveaux data centers en attendant de pouvoir fournir plus d'électricité.

"Plug baby, plug"

La France est très ouverte à l'implantation de ces centres de données avec le chef de l'État en tête du mouvement. En février, au sommet de l'IA à Paris, Emmanuel Macron, parodiant un peu Donald Trump, a lancé ce mot d'ordre "plug baby, plug" ["raccorde baby, raccorde"]. L'État propose 35 sites clé en main, et 109 milliards d'euros d'investissements privés sont prévus dans ce secteur.

Aujourd'hui, les data centers représentent 2% de la consommation électrique française. Selon les calculs du Shift project, si la progression se poursuit à ce rythme jusqu'en 2035, on arrivera alors à 7% de la consommation électrique. Sauf que la courbe de production ne suivra pas et l'empreinte des data centers sera donc plus importante. D'autant que ces centres de données sont concentrés sur deux régions essentiellement, autour de Paris et de Marseille, d'où un risque pour l'alimentation de ces régions.

Des centrales à gaz construites pour l'IA ?

Il y a des risques d'abord pour la consommation. La France pourrait être obligée de choisir entre l'alimentation des data centers et l'alimentation des transports ou du chauffage par exemple, ou de se lancer dans une politique de moratoire comme en Irlande. Par ailleurs, en Irlande, les entreprises qui développent des data centers se tournent désormais vers une alimentation au gaz, ce qui augmente le recours aux énergies fossiles. Cela représente un risque pour la trajectoire zéro émission en gaz à effet de serre et plus largement, cela a forcément des conséquences en terme de dérèglement climatique.

Autre risque, voir la dépendance se consolider vis-à-vis des États-Unis car, dans ce secteur, la majorité des leaders sont des entreprises américaines. Le Shift project demande donc une stratégie raisonnée d'implantation des data centers, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Et puis, chacun peut aussi faire un petit effort en lançant moins de requêtes sur les outils d'IA, comme la création de vidéos de chats qui chantent par exemple. Selon une étude, une seule image de très bonne qualité générée par une IA demande autant d'électricité que la recharge entière d'un smartphone.

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