: Reportage Attaque au couteau à Annecy : la vie d'errance de l'assaillant interpellé, "ce mec bizarre, un peu perché"
De son arrivée il y a quelques semaines à l'attaque commise jeudi dans le parc, franceinfo retrace le parcours de ce Syrien de 31 ans dans la préfecture de Haute-Savoie.
Océane Bermond a regardé la photo une énième fois pour être sûre. En avait-elle réellement besoin ? "C'est lui, c'est certain. Sa taille, sa barbe. Ça m'a fait tilt." Deux jours avant l'attaque au couteau commise sur l'esplanade du Pâquier à Annecy (Haute-Savoie), qui a fait six blessés dont quatre jeunes enfants, jeudi 8 juin, cette femme de 28 ans a croisé la route du suspect. "C'était mardi, juste là, dans le Jardin de l'Europe, se souvient-elle, passablement émue. Je jouais avec mon chien, Maïko, quand la balle est passée tout près de ce gars. Il a grommelé." Océane Bermond, qui travaille à Annecy comme technicienne de recherche en cancérologie, se rappelle aussi son regard "dur, un peu mesquin". "Surtout, il avait un tee-shirt sur la tête, je trouvais ça vraiment bizarre, mais je n'ai pas fait attention."
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Un loueur de bateaux sur le lac se souvient lui aussi de cet homme. "Ça faisait tellement longtemps qu'on le voyait sur les bancs qu'il était devenu un décor, quelqu'un de banal, raconte-t-il. Le matin, il était là, tranquille. Il ne faisait rien, il regardait les paysages, il ne faisait pas la manche, rien. Il nous laissait tranquilles, on le laissait tranquille. C'était le type du banc quoi."
Placé en garde à vue après l'attaque, ce Syrien de 31 ans n'a pas encore été interrogé. Il doit subir un examen psychiatrique vendredi matin. Mais des éléments permettent déjà de comprendre sa vie d'errance à Annecy, où il est arrivé ces dernières semaines, selon les versions obtenues par franceinfo.
Sans domicile fixe, comme l'a précisé la procureure d'Annecy jeudi, il dormait dans un hall d'immeuble de la rue Royale, artère commerçante de la ville, juste à côté d'une boutique de vêtements. "Je le voyais en rentrant du travail, raconte un voisin d'en face. Il s'installait là vers 18h30 ou 19 heures, Et le matin, quand je partais, il n'était déjà plus là." Jamais d'alcool, jamais de drogue, les commerçants l'assurent : "On n'avait jamais eu à s'en plaindre." Vendredi matin, son carton était toujours là, replié contre le mur, sous les boîtes aux lettres.
Lucas, une artiste de rue de 19 ans qui expose ses dessins quelques mètres plus loin, a encore vu le marginal mercredi, soit la veille de l'attaque. "Comme d'habitude, il avait l'air dans son monde, un peu perché. Mais il n'avait pas l'air méchant, vraiment pas. Je pensais qu'il ne ferait pas de mal à une mouche." Il y a une semaine, "comme ça", le trentenaire lui a donné un paquet de cigarettes neuf, "alors qu'[elle] n'avai[t] rien demandé". Il se posait à côté, "toujours silencieux, toujours seul, toujours avec sa bouteille d'eau bourrée de tranches de citron". Après quinze minutes de discussion, elle "reconnaît un truc" : "Mon copain ne l'a jamais senti. Il me disait qu'il dégageait un truc malsain."
"Un type pas net"
Au centre culturel Bonlieu, non loin du lac, où l'homme avait aussi ses habitudes, "c'était le type sur qui on avait toujours un œil", admet un employé. "Il venait seul, avec sa bouteille d'Oasis et son sandwich, il s'asseyait sur les chaises bleues. Il regardait son téléphone, passait des appels en visio. Il avait toujours un grand sac noir. Mais je n'ai jamais vu d'arme sur lui. Je ne l'ai jamais vu faire de mal. C'était un marginal comme les autres. Il restait une heure ou deux, puis il repartait."
Où errait-il ensuite ? L'emploi du temps de ce chrétien de Syrie était souvent le même. Il se lavait les dents et le visage dans les toilettes du centre culturel, à droite de la boutique de BD, selon des témoins. Il pouvait se rendre au Burger King voisin pour recharger la batterie de son téléphone, dans la salle du fond. Ou squatter un muret de la brasserie Le Bon Lieu, "essentiellement le matin", observe un serveur.
D'autres témoins, présents au centre culturel, affirment qu'il "suivait par moments les vigiles lors des rondes", "qu'il cherchait les caméras de surveillance", "qu'il faisait des gestes bizarres". "Quand la police arrivait, il se crispait, ça se voyait." Un commerçant du centre-ville confirme que des agents de sécurité sont venus récemment l'informer que "ce type n'était pas net". Le week-end dernier, des passants l'ont aussi aperçu dénudé près du lac, a appris franceinfo de source policière.
Sur TF1, jeudi soir, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a fait remarquer une "coïncidence troublante" entre la réponse négative de l'administration française à sa demande d'asile, le 4 juin, et le jour de l'attaque, le 8 juin. Lors d'un point-presse jeudi en début d'après-midi, la procureure d'Annecy, Line Bonnet-Mathis, a précisé que ce SDF n'avait ni antécédent judiciaire, ni antécédent psychiatrique. Une enquête a été ouverte pour tentatives d'assassinat et "il n'y a aucun mobile terroriste apparent", a poursuivi la magistrate. Jeudi, en fin de journée, les enquêteurs devaient passer au centre Bonlieu pour récupérer les images de vidéosurveillance.
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