Témoignage "Il me paraît important de lever le tabou" : une victime de Joël Le Scouarnec se confie sur la transmission de ses traumatismes de violences sexuelles à ses enfants

Camille Maréchal a été violée par Joël Le Scouarnec à l'âge de 11 ans. Elle a choisi d'en parler à ses enfants avec des mots simples pour "sensibiliser cette génération à lever le tabou sur les agressions sexuelles et les viols".

Article rédigé par franceinfo
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Une manifestation des victimes de Joël Le Scouarnec devant le palais de justice de Vannes, le 19 mai 2025. (DAMIEN MEYER / AFP)
Une manifestation des victimes de Joël Le Scouarnec devant le palais de justice de Vannes, le 19 mai 2025. (DAMIEN MEYER / AFP)

"Ma fille a une peur bleue qu’il sorte de prison", témoigne, vendredi 23 mai, sur France Culture, Camille Maréchal, violée à l’âge de 11 ans par Joël Le Scouarnec. Après trois mois d'audience, c'est l'heure des réquisitions au procès de l'ex-chirurgien. Il est jugé à Vannes pour des viols et agressions sur 299 personnes – la plupart d’anciens patients, garçons et filles, mineurs à l’époque. L’accusé a reconnu l'intégralité des faits qui lui sont reprochés, tout en affirmant ne pas se souvenir individuellement des victimes, des violences qu’il a cependant consignées dans des carnets.

Parmi celles et ceux venus témoigner à la barre, certaines femmes ont évoqué leur difficulté à devenir mère. Camille Maréchal, 33 ans, a fait le choix d’en parler à ses enfants, âgés aujourd’hui de cinq et six ans. Son témoignage illustre l’ampleur du traumatisme vécu par les victimes. Elle est maman d’une petite fille de cinq mois lorsque les enquêteurs lui apprennent qu’elle a été violée à l’âge de 11 ans par Joël Le Scouarnec. "On va dire que j'ai été une maman en pilote automatique pendant plusieurs mois, je pense", raconte-t-elle. Lors de sa deuxième grossesse, une expertise psychologique est menée pour évaluer l’impact du traumatisme sur son bébé. Son fils, très tendu, "refuse toute prise en charge par des hommes, donc il faut que ce soit une coiffeuse, une docteur, ce n'est pas anodin pour moi", dit-elle.

"En parler vraiment librement"

Camille Maréchal a choisi de parler à ses enfants, avec des mots simples mais précis, ce qui a suscité de nombreuses réactions, surtout à l’approche du procès : "Ma fille a une peur bleue qu’il sorte de prison et qu’il recommence. Mon fils a pu dire qu’il avait très mal au cœur, ils ont fait un slogan : 'Joël aux grandes oreilles tu es un camion poubelle'."

Avoir brisé le silence sur son traumatisme d'enfance permet à la famille d’affronter ensemble l’épreuve du procès. "Ils le vivent avec nous ce procès finalement. Ce sont des encouragements, 'allez il faut l'écrabouiller', etc. Je trouve ça très sain en fait qu'ils en parlent ouvertement", estime-t-elle. Camille Maréchal a profité de ce temps judiciaire pour faire de la prévention auprès de ses enfants : "Il me paraît important de lever le tabou, sensibiliser cette génération à lever le tabou en fait sur les agressions sexuelles et les viols, pour qu’on puisse en parler vraiment librement."

Le collectif des victimes de l'ex-chirurgien réclame désormais des actions concrètes des pouvoirs publics, une meilleure écoute de la parole de l’enfant et des barrières efficaces pour que de telles défaillances ne se reproduisent plus.

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