Loi Duplomb : qu'est-ce que l'acétamipride, le pesticide au cœur des débats ?

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Article rédigé par France 2 - J. Wild, J. Heins, M. Damoy, X. Roman, M. Renier, A. Brodin - Édité par l'agence 6médias
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L’acétamipride est un insecticide interdit en France depuis 2020 et autorisé dans le reste de l'UE, que la loi Duplomb prévoit de réintroduire. Une pétition signée par plus d'1,6 million de Français réclame le retrait du texte, dénonçant des risques pour la santé. Quels sont ces risques, et quelle est cette molécule ?

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.


Un mot cristallise les débats ces derniers jours : l'acétamipride, un pesticide interdit en France depuis 2020, qui pourrait faire son retour prochainement. Plus d'1,5 million de Français s'y opposent. Pourquoi ce produit est-il si controversé ? En agriculture, l'acétamipride permet de lutter contre des insectes comme les pucerons verts. Ils attaquent par exemple les cultures de betteraves d'un producteur de l'Oise. "Si le puceron attaque, la betterave va continuer de grossir jusqu'à peu près cette taille-là, et après elle va s'arrêter. Alors que normalement elle doit atteindre cette taille-là", montre-t-il.

La molécule est donc vitale selon lui pour la filière. Sans elle, les betteraviers perdraient 30% de leur rendement en moyenne. Les producteurs de noisettes, eux aussi, réclament son utilisation. Mais l'acétamipride ne tue pas uniquement les insectes qu'il est censé combattre : les abeilles peuvent aussi en être victimes.

"Si on épand de plus en plus d'acétamipride, on aura de moins en moins de pollinisateurs puisque c'est une substance qui, malgré tout, reste très toxique pour les insectes. Et bien évidemment, cela signifie que l'on subira des pertes de rendement sur des cultures. Il faut se rappeler qu'un colza non pollinisé, c'est 30% en moins. Sur d'autres plantes comme le cassis, ça peut aller jusqu'à 60% en moins", explique Philippe Grandcolas, écologue et directeur de recherches au CNRS.

Des effets sur la santé

Qu'en est-il pour la santé humaine ? Une quarantaine d'organisations scientifiques et d'associations représentant des patients estiment que les risques sont réels, en particulier pendant la grossesse. Selon plusieurs travaux scientifiques, la molécule traverserait le placenta pour se loger dans le cerveau du fœtus. "On sait que plus on trouve ce produit dans les urines des femmes enceintes au premier trimestre de la grossesse, moins le quotient intellectuel des enfants sera élevé. Donc, nous avons des preuves de la toxicité de ces produits pour le développement neurologique des enfants", indique le Pr. Pierre Sujobert, professeur d'hématologie au Centre hospitalier universitaire de Lyon (Rhône)

Impact sur le diabète ou les maladies rénales, ces dernières années les études se sont multipliées, mais ont été réalisées sur de petits effectifs. Certains chercheurs réclament donc des études de plus grande ampleur pour confirmer la dangerosité du produit. Pourrait-on se passer de l'acétamipride ? Il serait possible d'utiliser des parfums pour éloigner les insectes des betteraves, ou encore des pièges pour attirer les punaises destructrices de noisettes. Des solutions jugées insuffisantes.

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