Loin des objectifs, les aides à la rénovation énergétique demeurent "complexes" et "illisibles", dénonce une étude de l'UFC-Que Choisir

Les conclusions, publiées lundi, pointent des subventions "mal calibrées". L'association de consommateurs "appelle à un changement de méthode immédiat".

Article rédigé par franceinfo
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Des ouvriers travaillent à l'isolation d'une maison à Valence (Drôme), le 6 septembre 2023. (NICOLAS GUYONNET / HANS LUCAS / AFP)
Des ouvriers travaillent à l'isolation d'une maison à Valence (Drôme), le 6 septembre 2023. (NICOLAS GUYONNET / HANS LUCAS / AFP)

Le constat est sévère pour l'Etat, appelé à revoir sa copie sur les aides à la rénovation énergétique des logements. Celles-ci "restent complexes, illisibles et mal calibrées, freinant les ménages à se lancer", dénonce l'association de consommateurs UFC-Que Choisir, qui publie lundi 5 mai les conclusions d'une étude pointant "l'inefficacité persistante des dispositifs". Alors que le gouvernement avait fixé pour 2024 l'objectif de 200 000 rénovations d'ampleur, seules 91 374 ont été réalisées.

L'un des problèmes concerne le manque de clarté, qui peut décourager. "MaPrimeRénov', qui concentre 88% des aides à la rénovation, reste un dispositif complexe à mobiliser pour les ménages", écrit l'UFC-Que Choisir, ajoutant qu'un quart des bénéficiaires juge les démarches administratives trop compliquées.

"Il y a différents types d'aides auxquelles chaque ménage a le droit. Vous avez plein de critères en fonction de vos ressources, de la localité géographique, du type de travaux et du type de maison et de logement que vous avez. Et en plus de ça, la moindre virgule dans votre dossier peut vous faire annuler l'ensemble des aides auxquelles vous avez le droit", exposait en février 2024 Pierre Maillard, président de l'entreprise Hellio, qui accompagne des ménages dans leurs travaux de rénovation.

Le flou et la complexité s'intensifient encore avec les Certificats d'économies d'énergie, dispositif qui oblige les fournisseurs d'énergie à financer des actions d'économies d'énergie. Avec ce mécanisme, "les ménages doivent identifier eux-mêmes les offres de primes, sans outil public de comparaison pour les guider dans leur choix", déplore l'UFC-Que Choisir.

Des aides "pas encore assez incitatives"

Un autre écueil concerne le montant des enveloppes, jugé insuffisant. "Pour les rénovations d'ampleur, les montants peuvent être très conséquents et les aides ne sont pas encore assez incitatives", commente Clarisse Berger, chargée de mission énergie et logement à l'UFC-Que Choisir. Le coût moyen d'un projet de rénovation d'ampleur en logement individuel s'élève ainsi à 59 197 euros, selon l'Agence nationale de l'habitat (Anah).

La faiblesse des aides ne s'est pas améliorée : en 2025, une baisse des subventions de 30% pour les chauffages au bois ou autres biomasses a été actée, et, pour les ménages les plus modestes, les avances pour travaux sont passées, le 1er janvier, à maximum 50% de la somme engagée contre 70% jusqu'alors. Ces modifications sont synthétisées sur la page du ministère de l'Economie dédiée à MaPrimeRénov'.

Un troisième problème, mentionné par l'UFC-Que Choisir, est lié aux pratiques frauduleuses qui "gangrènent" le secteur, déplore Clarisse Berger. C'est ce qui a poussé l'association à porter l'interdiction du démarchage à domicile pour réaliser des travaux de rénovation énergétique. Le fléau touche particulièrement les personnes vulnérables, et le montant moyen en jeu s'élève à environ 20 000 euros par dossier. Les victimes, déjà fragilisées, se retrouvent alors dans des difficultés encore plus importantes. La situation est si sérieuse que plusieurs sites officiels, comme celui du ministère de l'Economie ou encore Signal Conso, livrent des conseils pour se protéger et identifier les pratiques illégales.

Un rebond du nombre de demandes en trompe-l'œil ?

Mis bout à bout, les différents problèmes n'encouragent pas à se lancer dans le parcours pour entamer des travaux de rénovation. "Il faut redonner confiance aux particuliers" et que "les ménages arrivent à s'y retrouver", poursuit Clarisse Berger. L'UFC-Que Choisir demande à l'Etat "un changement de méthode immédiat", avec notamment la création d'un "guichet unique pour toutes les aides, y compris dans le cadre de rénovations par geste", le développement d'un "comparateur officiel" des primes pour les Certificats d'économies d'énergie, et une "revalorisation des niveaux d'avances".

Mais avant même que ces solutions se concrétisent, un rebond des demandes a été constaté. Après un bond en fin d'année 2024 (70 408 dossiers déposés au dernier trimestre), selon l'Anah, le nombre d'aides accordées a connu une forte hausse en premier trimestre 2025 : 17 178, soit trois fois plus que pour la même période de l'année précédente, toujours d'après l'Anah.

Ces chiffres reflètent, selon elle, une "appropriation progressive" du dispositif d'aide publique aux rénovations d'ampleur. Mais cette lecture enthousiaste de l'Anah peut être tempérée en soulignant que 2024 a été une année terne pour les rénovations énergétiques des bâtiments, avec une baisse de 40% par rapport à 2023, et que les volumes restent encore nettement en deçà des objectifs.

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