Erosion, submersion marine... Plus de 30 000 logements vendus sur le littoral entre 2020 et 2024 sont menacés d'ici à 2050, selon une étude
Un rapport de l'association Conséquences montre que les biens les plus exposés aux aléas climatiques restent les plus demandés, et donc les plus chers. Elle propose un outil pour évaluer le risque à une adresse donnée.
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Si vous habitez dans une commune du littoral français, la question vous a sans doute déjà traversé l'esprit : "Ma maison est-elle menacée par la montée des eaux ?" A l'occasion de la publication d'un rapport sur la vulnérabilité des biens immobiliers aux risques d'érosion côtière ou de submersion marine, l'association Conséquences et la start-up française Callendar mettent en ligne, mercredi 27 août, un outil qui permet d'évaluer, pour une adresse donnée, le niveau d'exposition à ces aléas. Car si ces derniers sont amplifiés par le changement climatique, ils restent sous-estimés par les propriétaires et futurs acheteurs, toujours plus attirés par les littoraux.
"Malgré l'obligation de mentionner l'exposition à l'érosion [depuis 2023] ou à la submersion [depuis 2003] lors d'une vente, le risque semble n'avoir aucun effet face l'attractivité du front de mer et la pression immobilière", s'inquiète Conséquences. Ainsi, "33 000 logements vendus entre 2020 et 2024", pour une "valeur totale de 8,3 milliards d'euros", "seront concernés par la submersion ou l'érosion en 2050, en l'absence de protection suffisante", évalue l'association.
"Une logique immobilière aveugle au risque"
La menace climatique ne freine pas non plus la création de nouveaux logements : ces cinq dernières années, sur l'ensemble du territoire français, "3 146 permis de construire ont été délivrés dans des zones concernées" par ces mêmes risques. Du Nord-Pas-de-Calais à Mayotte en passant par la Vendée et la Guyane, tout le littoral français est concerné à divers degrés par les phénomènes d'érosion, de submersion permanente ou de submersion temporaire (une probabilité annuelle d'au moins 10% d'être inondé lors d'un phénomène climatique extrême).
"Les risques d'érosion, de submersion permanente et d'inondation lors d'événements climatiques extrêmes ont été évalués à l'horizon 2050 et 2100 sur près de 30 millions de parcelles, y compris dans les départements d'outre-mer", explique Thibault Laconde, directeur de la start-up Callendar, spécialisée dans l'évaluation des menaces climatiques. L'étude de l'entreprise pour Conséquences croise les projections du Giec sur l'élévation du niveau de la mer avec des données sur les transactions immobilières.
En moyenne, les biens exposés à l'horizon 2050 sont 26% plus cher que dans le reste des communes concernées, poursuit Conséquences, dont le directeur, Sylvain Trottier, dénonce "une logique immobilière aveugle au risque, qui fige le front de mer", et appelle à soutenir les élus locaux face aux défis de l'adaptation au changement climatique. Ainsi, à Treffiagat (Finistère), la collectivité a dû racheter sept maisons menacées par l'érosion côtière et la submersion marine afin de les détruire, rappelle le rapport.
Au Grau-du-Roi (Gard), où 621 logements à risque en 2050 se sont vendus entre 2020 et 2024 (30% des logements vendus sur cette période sur la commune), le maire, Robert Crauste, premier président délégué de l'Association nationale des élus des littoraux (Anel), constate un inquiétant décalage. "On ne perçoit pas l'influence des risques sur le prix de l'immobilier, qui se trouve en moyenne à 5 000 euros du mètre carré", déplore-t-il, pointant le défi auquel font face les collectivités concernées.
Des évènements qui s'entretiennent mutuellement
En 2010, 47 personnes avaient péri lors du passage de la tempête Xynthia, dont 29 dans la seule commune de La Faute-sur-Mer, quand un lotissement avait été inondé après la rupture d'une digue. Emblématique du potentiel dévastateur des phénomènes de submersions marines, cette tempête a contribué à accélérer l'érosion du littoral, notamment à Soulac-sur-Mer (Gironde) où le Signal, un immeuble construit dans les années 1960, a dû être abattu en 2023. Au moment de sa construction, le bâtiment s'élevait à 200 mètres de la plage. Quand il a été détruit, il n'était plus qu'à quelques dizaines de mètres de l'eau.
"Les vagues submersions entraînent ou accélèrent l'érosion, tandis que l'érosion fragilise les zones côtières exposées aux vagues submersions", insiste le rapport. "Ces aléas sont liés." Et favorisés par le changement climatique causé par les activités humaines.
"Le réchauffement climatique contribue à une hausse du niveau moyen des mers, qui augmente les impacts des vagues sur les côtes et donc l'érosion côtière, ainsi que la fréquence et l'amplitude des niveaux extrêmes et donc les submersions marines."
L'association Conséquencesdans un rapport
Selon les données du Cerema, un établissement public, environ 900 km de côtes sont actuellement en recul en France, soit 20% du littoral. Une part amenée à s'accroître avec la montée des eaux. Or, selon le ministère de la Transition écologique, les communes littorales concentrent près de 12% de la population française. Dans l'Hexagone, la population littorale est même deux fois plus dense que la moyenne nationale, avec environ 280 habitants au km carré.
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