Des chercheurs veulent lever des fonds pour explorer les profondeurs de l'océan Antarctique
Le laboratoire d'océanographie de Villefranche-sur-Mer souhaite immerger des robots sous la banquise pour analyser la vie sous-marine. Une première mondiale propulsée grâce à une plateforme de financement participatif.
Alors que la COP21 bat son plein à Paris, les Français ne manquent pas d'idées pour sensibiliser le grand public aux questions climatiques. C'est dans cette optique que le laboratoire d'océanographie de Villefranche-sur-Mer (Alpes-Maritimes) a lancé 66° sentinelles de l'océan polaire, un projet scientifique financé grâce au financement participatif, et qui vise à étudier la vie qui s'épanouit dans les eaux glacées de l'océan Austral, qui borde l'Antarctique.
Sorte de bouées intelligentes, ces flotteurs-profileurs sont déjà très répandus dans les mers de notre planète. Lancés en 2000 dans le cadre du projet international Argos, près de 4 000 capteurs plongent jusqu'à 2 km de profondeur et mesurent régulièrement la température, le niveau et la salinité de l'eau, comme l'explique cette vidéo.
Mais aucun flotteur-profileur n'avait encore réussi à s'aventurer dans les étendues glacées des océans polaires. "Lorsqu'ils remontaient à la surface, les flotteurs que nous utilisions jusqu'à présent restaient coincés dans la glace et partaient à la dérive, explique Jean-Baptiste Sallée, chercheur au CNRS impliqué dans le développement du projet. Pour résoudre ce problème, nous avons équipé ces nouveaux robots de détecteurs qui leur permettent de rester dans les profondeurs jusqu'à la fonte de la banquise." Grâce à un nouveau système de stockage, les données seront sauvegardées en toute sécurité pendant plusieurs mois, jusqu'à l'été, lorsque la glace fond : la balise peut alors remonter à la surface et communiquer ses découvertes par satellite.
"L'océan polaire perd son oxygène"
Les chercheurs pourront donc analyser les fonds marins polaires tout au long de l'année. Pour cette première, les robots seront également équipés de nouveaux capteurs, bien plus précis, qui en plus des mesures physiques de l'eau vont analyser les prémices de la vie sous la glace. "Aux pôles, on a très peu de possibilités d'observation, déplore Jean-Baptiste Sallée. Pourtant, c'est là-bas que les changements climatiques sont les plus impressionnants. On veut prendre des mesures sous la banquise pendant toute la saison d'hiver, et réussir à observer, au printemps, des phytoplanctons, ces algues microscopiques qui sont à l'origine de la vie sous-marine."
Hervé Claustre, directeur de recherche au laboratoire de Villefranche-sur-Mer, a initié le développement de ces capteurs biologiques (BioArgos) il y a maintenant quatre ans : "C'est grâce aux balises Argos que nous avons su comment et pourquoi les océans se réchauffent de façon aussi rapide, rappelle le chercheur. Et le projet BioArgos a le même but. L'océan perd son oxygène, et nous avons besoin de ce réseau de capteurs pour surveiller notre impact sur notre planète."
Pour financer le projet, l'équipe de Villefranche a tenu à passer par le financement participatif. En se connectant sur le site de financement Ulule, on peut donc apporter sa pierre à l'édifice scientifique. Chaque montant fait écho aux objectifs des scientifiques : 66 euros, en référence à la latitude du cercle polaire ; ou encore 1772 euros, en référence à l'année de découverte des îles Kerguelen. L'objectif a été fixé à 20 000 euros, soit "le prix pour installer le tout premier flotteur", expliquent les scientifiques.
Impliquer le grand public grâce au financement participatif
La campagne est couplée à un projet éducatif très poussé : sur la plateforme Mon océan et moi, des jeux en ligne et des supports pédagogiques sont mis à la disposition des élèves et des professeurs pour les initier à la vie marine. Dans le cadre du projet Adopt a float, des classes de tous niveaux pourront même nommer leur propre robot et suivre ses divagations au rythme des courants grâce à une carte interactive. Elles recevront toutes les données scientifiques mesurées par la balise.
La démarche est plus symbolique que financière. "Nous pouvons réussir le projet sans le financement participatif. Mais pour nous, c'est une façon de lier le grand public à une aventure qu'ils auront envie de suivre, de les faire participer à la naissance d'une grande recherche. C'est une chose de s'adresser aux décideurs politiques. Mais les jeunes générations sont les présidents de demain. Nous voulons les sensibiliser dès maintenant aux problèmes du climat."
Mais le temps presse : il ne reste plus que deux semaines pour atteindre l'objectif. En cas d'échec, la campagne sera automatiquement annulée et tout l'argent sera reversé aux contributeurs. Mais Hervé Claustre n'est pas inquiet : "La collecte grimpe tous les jours ! Il ne nous faut plus que quelques milliers d'euros pour y arriver." Et même si le montant n'était pas atteint, le chercheur est certain d'avoir touché un nouveau public. "Grâce à cette communication, on a réussi à faire parler de nous et de notre projet", se félicite le chercheur.
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