Surpopulation carcérale : peut-on louer des cellules à l'étranger ?

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Article rédigé par L'Oeil du 20 heures - A. Peyrout, T. Curtet, S. Broyet, S. Grippon, M. Czaplicki, F. Cardoen
France Télévisions

Gouvernement recherche places de prison. Face à des prisons plus que pleines, le chef de l’Etat envisage de louer des cellules à des prisons de pays étrangers, pour y envoyer nos détenus. Mais est-ce réellement faisable ? L’Œil du 20 heures s’est penché sur la question.

Lors du grand oral du président de la République, le 13 mai, la proposition est venue du maire de Bézier, élu avec le soutien de l’extrême droite, Robert Ménard. Et Emmanuel Macron a semblé valider.

Du pragmatisme dit-il, face à des prisons qui craquent. Plus de 122 % de taux d’occupation en France. Alors pourquoi pas envoyer nos détenus chez nos voisins qui ont encore des cellules libres : 81,8 % d’occupation en Allemagne, et 73,8 % seulement en Espagne.

Esquissée par le garde des Sceaux il y a quelques semaines, mais seulement pour les détenus étrangers, l’idée séduit déjà ailleurs en Europe.

Les Danois, par exemple, viennent de signer un accord avec le Kosovo, pour y louer quelques 300 places, pour la modique somme de 200 millions d’euros par an.

Une expérience tentée aussi en 2010 par nos voisins belges. Les Pays-Bas ont accueilli jusqu’à 650 prisonniers. Le tout dans une seule prison à Tilburg. Inauguration en grande pompe, à l’époque. Et à écouter les agents interrogés par la télévision belge, les premiers détenus sont alors, dithyrambiques.

Pourtant, 13 ans, et 300 millions d’euros plus tard, le programme est arrêté. Le gouvernement belge le trouve alors beaucoup trop cher, notamment à cause de coûts annexes.

"Les transferts, par exemple. Quand un détenu devait se rendre à une audience en Belgique, il fallait un fourgon qui aille spécifiquement chercher ce détenu et le ramener ensuite à la prison, aux Pays-Bas. Et ça, ça avait un surcoût important."

Juliette Moreau, avocate au barreau de Bruxelles et membre de l’Observatoire International des Prisons (OIP) Belgique

En France, les professionnels de la justice ne sont pas plus emballés. La mesure soulèverait selon eux, de nombreuses questions.

"C'est une idée qui peut paraître de bon sens, mais qui pose beaucoup de difficultés et de problèmes juridiques : quel droit serait applicable pour les prisonniers français à l'étranger ? Quel sera le juge d'application des peines qui continuera à les suivre ?"

Ludovic Friat, Magistrat et président de l'Union syndicale des magistrats

Se pose aussi la question du maintien des relations familiales. Un droit pour tous les détenus selon la Cour européenne des droits de l’Homme.

Côté exécutif, l’annonce a quelque peu stupéfait. Contacté, un conseiller s’est dit surpris de la position d’Emmanuel Macron, improvisée précise-t-il.

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