Témoignage "On a besoin de vivre pendant et après le mandat" : une maire alerte sur le statut d'élu local, en voie d'être réformé au Parlement

Revalorisation des indemnités, prise en charge des frais de transport, garde d'enfants... La proposition de loi visant à réformer le statut d'élu local arrive lundi à l'Assemblée nationale. Elle peine pourtant à convaincre pleinement les maires.

Article rédigé par franceinfo - Matthias Troude
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Un buste de Marianne portant l'écharpe de maire (LUDOVIC MARIN / AFP)
Un buste de Marianne portant l'écharpe de maire (LUDOVIC MARIN / AFP)

Les maires bénéficieront-ils enfin d'un nouveau statut d'élu local ? Une proposition de loi en ce sens a été adoptée à l'unanimité par le Sénat il y a plus d'un an, en mars 2024. Elle arrive lundi 7 juillet à l'Assemblée nationale, dans les mains des députés. L'objectif : endiguer la crise de vocations et de démissions chez les maires, qui sont près de 2 200 à avoir démissionné depuis 2020. À l'approche des élections municipales de 2026, les élus locaux alertent sur la nécessité de réformer leur fonction.

À Chilly-Mazarin, en région parisienne, c'est une élue sur tous les fronts qui officie dans son bureau. Rafika Rezgui, la maire socialiste de cette ville d'Essonne enchaîne les réunions, les inaugurations et les rendez-vous. Cette juriste dans le privé a dû quitter son travail dans l'urgence pour rejoindre sa mairie : "J'ai dû déposer une absence de dernier moment." Une absence durant laquelle elle n'est pas payée.

Jongler entre vies professionnelle et personnelle

Rafika Rezgui dénonce un certain manque de considération pour le statut des maires, qui exercent parfois une autre profession à côté : "Quand on est en entreprise et qu'on est conduit à devoir, au pied levé, se rendre dans notre mairie, nous n'avons droit à aucun régime d'absence autorisé". Des droits dont peuvent par exemple "bénéficier les sapeurs-pompiers volontaires", rapporte-t-elle.

Avec cette proposition de loi, la maire socialiste espère pouvoir mieux concilier le mandat avec la vie professionnelle et personnelle. Le texte prévoit notamment une revalorisation des indemnités, la prise en charge des frais de transport et de garde d'enfants, et met l'accent sur la formation. Mais l'élue reste sceptique quant à cette proposition de loi : "Il y a des améliorations qui sont prévues en termes de prise en compte pour la retraite, mais je trouve que c’est encore insuffisant." Elle rappelle la charge de travail qui pèse sur les maires.

"La fonction d'élu, elle nous passionne, elle nous enthousiasme, elle est éreintante, c'est vrai. Mais il faut bien aussi penser qu'on a besoin de vivre pendant le mandat et après le mandat, et aujourd'hui c'est insuffisamment pris en compte."

Rafika Rezgui, maire de Chilly-Mazarin, dans l'Essonne

à franceinfo

Pour Rafika Rezgui, créer un statut de l'élu ne résoudra pas tout. Elle a déjà été maire entre 2012 et 2014, et trouve que la fonction est devenue plus difficile, avec plus de réglementations et moins de moyens. "Un exemple très concret, ça a été la gestion de la canicule", explique-t-elle. Elle revient notamment sur le peu d'informations transmises, ce qui impacte son travail. "J'ai eu l'impression de revivre les épisodes de la Covid puisque les informations nous étaient données en dernière ligne droite, le dimanche soir, alors que ça faisait une semaine que l'épisode caniculaire était connu et qu'on aurait dû prendre toutes les mesures qui s'imposent", déplore-t-elle. Notamment pour "éviter que nos écoles soient des lieux où on étouffe".

Un phénomène plutôt décourageant pour les candidats aux municipales l'an prochain, alors que Rafika Rezgui confie avoir du mal à trouver des colistiers. En particulier des colistières, surtout lorsqu'elles sont mères de famille.

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