Après sa victoire surprise au 2d tour des législatives, le Nouveau Front populaire au défi de l'unité pour tenter de gouverner
L'alliance de gauche fait mieux qu'en 2022 et ambitionne d'appliquer son programme, malgré l'absence de majorité claire. Les nombreuses divergences qui la traversent peuvent aussi la pénaliser.
Une surprise et des dizaines d'interrogations. Au soir du second tour des élections législatives, dimanche 7 juillet, la gauche a remporté une victoire que peu d'instituts de sondages avaient évoquée durant une courte et intense campagne. Quatre semaines après la dissolution annoncée par Emmanuel Macron, les différents partis du Nouveau Front populaire ont envoyé 180 députés au sein du nouvel hémicycle, selon les résultats définitifs affichés par le ministère de l'Intérieur.
La coalition électorale de gauche a réussi le double pari qu'elle s'était fixé au lendemain des européennes disputées en ordre divisé. D'une part, éviter que le Rassemblement national et ses alliés s'emparent d'une majorité relative (voire absolue) et puissent être en mesure de former un gouvernement ; d'autre part, faire mieux que les 150 députés élus sous la bannière de la Nupes, en juin 2022, après l'élection présidentielle.
Une majorité très minoritaire
Sitôt la première place acquise, les dirigeants de La France insoumise, du Parti communiste, des Ecologistes-EELV et du Parti socialiste ont célébré leur succès et évoqué la suite, qui s'annonce plus floue que jamais dans une Assemblée polarisée. Forts de leur nouveau contingent parlementaire, ils ont revendiqué le droit d'accéder aux responsabilités au sein de l'exécutif. "Le président a le devoir d'appeler le Nouveau Front populaire à gouverner" et "celui-ci y est prêt", a lancé Jean-Luc Mélenchon. Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a de son côté déclaré que "le rôle du Nouveau Front populaire" serait de "refonder un projet collectif pour notre pays".
La gauche est cependant très loin d'obtenir 289 députés, le seuil de la majorité absolue pour gouverner sans risquer de motion de censure. "Si nous gouvernons, nous ne devons pas le faire comme Emmanuel Macron, nous devons le faire avec conscience que dans l'hémicycle, nous n'aurons qu'une majorité très, très relative, et une minorité dans le pays, nous devons gouverner avec respect, avec tendresse pour les Français", a mis en garde François Ruffin, réélu de justesse dans la Somme après avoir pris ses distances avec La France insoumise.
"Les électeurs nous laissent une dernière chance pour la France."
François Ruffin, réélu député dans la Sommelors d'une allocution
Par conséquent, une question se pose immédiatement au soir de cette victoire électorale pour la gauche, la première depuis les législatives de 2012 : avec qui La France insoumise, le Parti socialiste, Les Ecologistes-EELV et le Parti communiste français vont-ils tenter de gouverner ? "La première question, c'est : 'Pour faire quoi ?' C'est ça qui m'intéresse. Le 'pour faire quoi ?' va déterminer 'avec qui ?'" a évacué l'écologiste Marine Tondelier sur France 2.
Des divergences sur la suite
Avant le second tour, la secrétaire nationale des Ecologistes-EELV, qui s'est imposée comme "une nouvelle tête à gauche" durant la campagne, n'avait pas rejeté toute coalition avec une partie du bloc présidentiel, qui limite ses pertes en arrivant deuxième. "On doit se montrer prêts à gouverner", avait lancé Marine Tondelier dans Libération. "Le NFP appliquera son programme, rien que son programme, mais tout son programme", a insisté Jean-Luc Mélenchon dimanche soir, devant ses soutiens, une manière d'exclure tout compromis avec d'autres forces politiques. Olivier Faure, de son côté, a rejeté toute participation à une "coalition des contraires, qui trahirait le vote des Français".
Les règlements de compte personnels n'ont pas non plus cessé au soir du second tour. Raphaël Glucksmann a ainsi renvoyé dos à dos Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon. "C'est fini Jupiter et je vous rassure, il n'y aura pas Robespierre non plus", a lancé l'ex-tête de liste socialiste aux européennes sur TF1, en référence au leader de La France insoumise.
Des divergences de vues apparaissent également sur l'attitude à adopter dans les prochains jours. Sur France 2, la députée LFI Clémentine Autain a proposé une réunion de tous les députés de gauche, dès lundi, pour proposer un Premier ministre à Emmanuel Macron. "Ce n'est pas un groupe qui décide, c'est un président de la République qui nomme et une Assemblée nationale qui investit", lui a répondu François Hollande, ex-président socialiste élu député de la Corrèze, sur la même chaîne.
Les rapports de force rééquilibrés
Déjà, des voix appellent à maintenir l'unité du Nouveau Front populaire, après une campagne menée ensemble, mais marquée par des tensions. "Il faut qu'on s'épargne dans les mois et les années qui viennent les difficultés qu'on s'est nous-mêmes créées", a prévenu le député écologiste Benjamin Lucas sur LCP, mettant en garde contre les "vieux démons" de la division à gauche. Au Palais-Bourbon, la Nupes avait craqué à l'automne 2023, sous le poids de divisions idéologiques, notamment sur le conflit israélo-palestinien, ou sur la stratégie à adopter pour remporter des batailles politiques.
Désormais, la gauche aborde la nouvelle législature avec un rapport de forces rééquilibré à l'Assemblée nationale. Très dominant de 2022 à 2024 (75 députés), le groupe de La France insoumise reste le premier de la coalition de gauche mais ne progresse pas, avec 71 élus. "Cette stagnation est la preuve que la musique anti-LFI a fait son travail", analyse le politiste Simon Persico auprès de franceinfo.
Derrière, le Parti socialiste double son contingent de parlementaires, passant de 31 députés à 64. La progression est moindre chez Les Ecologistes, qui disposeront de 33 sièges, contre 21 jusqu'à présent.
"Ce résultat est surtout le fruit des accords électoraux conclus après les européennes, le PS et Les Ecologistes ont réussi à négocier des sièges plus gagnables."
Simon Persico, politisteà franceinfo
"Dans la construction de l'accord du Nouveau Front populaire, LFI a joué collectif, ils ont accepté de s'affaiblir", poursuit l'expert. Enfin, le Parti communiste français enverra 9 élus au Palais-Bourbon, avec l'espoir de conserver un groupe parlementaire aux côtés d'élus ultramarins. Et tenter de gouverner, si possible, avec ses partenaires de gauche.
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