: Vidéo Un dérivé du pétrole retrouvé dans des aliments du quotidien

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour le regarder en intégralité.

Dans toute bonne recette de famille, il y a souvent un ingrédient mystère, celui qu'on ne veut pas donner pour garder le secret. Et ça vaut aussi pour les industriels. Les fabricants d'huile sont toujours restés discrets sur un de leurs composants, l'hexane. Un solvant dérivé du pétrole, dont on retrouve des résidus jusque dans nos assiettes, comme le révèle ce soir l'Œil du 20 Heures. Quand les industriels de l'huile communiquent sur leur fabrication, tout a l'air très naturel : "La trituration consiste à séparer les matières grasses liquides des fibres et des protéines solides présentes dans les graines oléagineuses", explique un clip promotionnel du groupe Avril, qui possède notamment la marque Lesieur.

Ce que la vidéo ne montre pas, c'est que les industriels récupèrent ensuite la partie solide pour la laver avec de l'hexane: un solvant "ayant une odeur d'hydrocarbure" et un "effet neurotoxique" lorsqu'il est inhalé, d'après un rapport des autorités sanitaires françaises.

Un procédé pour extraire plus d'huile des graines

Mais pour les industriels, l'hexane a un avantage: il permet d'extraire encore plus d'huile des graines. À la fin du procédé, il reste des tourteaux protéinés, destinés à nourrir les animaux d'élevage. En théorie, l'hexane est alors éliminé.

En exclusivité, l'Œil du 20 Heures a eu accès à des résultats d'analyses menées par l'ONG Greenpeace. Sur 56 produits de la grande distribution testés, 36 contiennent des résidus d'hexane. D'abord, les huiles de différentes marques. Les traces d'hexane retrouvées restent inférieures aux limites prévues par la réglementation mais ces normes, vieilles de près de 30 ans, sont en train d'être réévaluées par Bruxelles.

Et pour Richard Ramos, il était temps. Le député vient de lancer une mission d'information sur l'hexane à l'Assemblée. Il réclame plus de transparence sur les étiquettes de l'agroalimentaire. "Ce qui est incompréhensible pour le consommateur, c'est que ce qu'on appelle un additif, c'est un produit qu'on met au début et qu'on retrouve à la fin, explique-t-il. Là, l'hexane, c'est un auxiliaire alimentaire. C'est-à-dire, il aide au process. Et donc, la loi est comme elle est pour l'instant, elle dit : je ne suis pas obligé de le mettre. Moi, le combat que je vais mener, ce n'est pas de dire au consommateur, il y a de la merde partout dans les produits industriels. C'est de dire aux industriels : au minimum, vous informez et, au mieux, vous l'interdisez", commente-t-il.

De l'hexane dans le lait, le poulet, le beurre et même le lait infantile

Mais il y a plus préoccupant. Des résidus d'hexane retrouvés dans d'autres produits que l'huile. Le lait, le poulet, le beurre et même le lait infantile. Comment est-ce possible ? Par téléphone, un ingénieur de la filière met sur la piste des aliments donnés aux animaux d'élevage, les fameux tourteaux traités à l'hexane. "Les possibilités de transfert d'hexane sur les produits animaux, ça a été un peu négligé. On ne s'y est pas intéressé tant que ça. Ce serait quand même bien de savoir, mais il y a un risque d'image. Si on commence à en parler, les gens vont vouloir arrêter l'hexane", confie-t-il.

Il ne faut pas se voiler la face. L'hexane ce n'est pas quelque chose que les industriels ont envie de mettre en avant.

Un ingénieur de la filière des oléoprotéagineux

à l'Œil du 20h

Sur ce sujet sensible, les industriels contactés par France Télévisions ne donnent aucune interview et renvoient à un représentant de la profession qui réfute tout risque pour le consommateur. "On est en dessous du niveau pour lequel la réglementation indique qu'il pouvait y avoir. (...) Ce n'est pas du tout : circulez, il n'y a rien à voir. C'est qu'on n'alerte pas le consommateur sur des choses qui n'existent pas. Il n'y a pas d'alerte sanitaire sur l'hexane actuellement", estime Hubert Bocquelet, délégué général de la fédération nationale des corps gras (FNCG).

Toutes les marques dans lesquelles des résidus d'hexane ont été trouvés par Greenpeace affirment qu'elles se conformeront aux nouvelles normes européennes si celles-ci venaient à changer. La réponse en 2027.