Thomas Legrand suspendu par France Inter après la diffusion de vidéos avec deux membres du PS

La radio du service public a annoncé la suspension du chroniqueur vendredi. La direction de France Inter justifie cette décision par le choix "de protéger l’antenne et le travail des journalistes de la rédaction de tout discrédit".

Article rédigé par franceinfo
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Le journaliste Thomas Legrand, en juin 2022. (JOEL SAGET / AFP)
Le journaliste Thomas Legrand, en juin 2022. (JOEL SAGET / AFP)

France Inter a suspendu "à titre conservatoire" le chroniqueur Thomas Legrand, vendredi 5 septembre, après la diffusion de plusieurs vidéos par le média conservateur L’Incorrect. La directrice de la station, Adèle van Reeth, précise samedi dans un mail interne que cette décision a été prise après la mise en ligne "d’un échange privé et informel entre Thomas Legrand, Patrick Cohen", également journaliste à France Inter et à France Télévisions, "et deux personnalités du Parti socialiste".

Ces vidéos ont été captées dans un restaurant, lors d’un rendez-vous privé ayant eu lieu début juillet à Paris, selon L’Incorrect. Pierre Jouvet, eurodéputé et secrétaire général du PS, est présent, ainsi que Luc Broussy, président du Conseil national du PS. On entend notamment Thomas Legrand déclarer : "Patrick [Cohen] et moi, on fait ce qu’il faut pour [Rachida] Dati". "Ces enregistrements ont été obtenus à l’insu des personnes concernées. Les propos sont manifestement tronqués et sortis de leur contexte. Les méthodes employées ici sont illégales et déloyales et je les condamne fermement", ajoute Adèle van Reeth.

Rachida Dati a réagi vendredi soir, sur X. "Des journalistes du service public et Libération affirment "faire ce qu’il faut" pour m’éliminer de l’élection à Paris. Des propos graves et contraires à la déontologie qui peuvent exposer à des sanctions", a écrit la ministre de la Culture.

"Les propos tenus peuvent prêter à confusion"

"Il n’en demeure pas moins que les propos tenus par Thomas Legrand peuvent prêter à confusion et alimenter la suspicion quant à l’utilisation de notre antenne à des fins partisanes", poursuit la directrice de France Inter. "Il est de ma responsabilité de protéger la chaîne de toutes ces accusations qui sont particulièrement délétères pour le travail que vous réalisez au quotidien à l’antenne comme sur le terrain". Thomas Legrand "reconnaît que la priorité est de protéger l’antenne et le travail des journalistes de la rédaction de tout discrédit." Le chroniqueur, qui travaille également à Libération, n’animera pas l’émission "Face à Thomas Legrand", dimanche matin sur France Inter, "le temps d’éclaircir la situation".

"Je comprends que la diffusion de cette vidéo puisse susciter de la suspicion", a écrit Thomas Legrand sur X, samedi après-midi. "Concernant les propos qui ont été tenus au sujet de madame Dati, et alors que la ministre de la Culture est lestée de nombreuses poursuites judiciaires, je tiens des propos maladroits", poursuit le journaliste, déplorant qu'il soit "possible, par l'intermédiaire d'une vidéo volée, de mettre en cause l'ensemble d'une profession". "On a pris des bouts de phrase. Il n'y a pas 20 secondes de conversation suivie. C'est complètement manipulatoire", a de son côté déclaré Patrick Cohen, auprès de l'AFP.

Nombreuses réactions politiques

Plusieurs personnalités et partis politiques ont réagi, samedi, après la publication de ces vidéos. "Voir des journalistes du service public assumer de vouloir 'faire ce qu'il faut' contre la ministre de la Culture pour faire gagner la gauche à Paris dans une collusion totale avec le PS est révoltant", s'est indigné LR, le parti de Rachida Dati, sur X. Jean-Luc Mélenchon (LFI) s'est joint à ces critiques, également sur le réseau social, dénonçant une "consternante vidéo."  Laurent Jacobelli, porte-parole du RN, a déploré samedi matin sur franceinfo "les images de monsieur Legrand et monsieur Cohen en train de comploter pour essayer de faire en sorte que la gauche gagne aux élections", plaidant pour une "privatisation" du service public audiovisuel. 

Le PS a également réagi, par communiqué, assurant qu'"aucune collusion n’existe entre le Parti socialiste et les journalistes quels qu’ils soient. Il suffit pour s’en convaincre de lire ou d’écouter leurs éditoriaux." Le SNJ Radio France (Syndicat national des journalistes) "soutient Thomas Legrand" et dénonce, dans un communiqué publié samedi, "cette caricature permanente de notre 'Maison ronde' en 'Maison rouge'". 

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