"La pointeuse suscite un rejet massif" : pourquoi les contrôleurs aériens font grève (entre autres) contre les badgeuses
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Des centaines de vols vont encore être annulés, en particulier dans les aéroports parisiens, au deuxième jour d'une grève des contrôleurs aériens. Ils dénoncent notamment la mise en place d'un pointage à leur prise de poste.
Dans la journée de jeudi, 933 vols ont été supprimés au départ ou à l'arrivée de la France. Vendredi 4 juillet, jour de grands départs, la situation devrait être encore plus tendue dans les aéroports parisiens, puisque la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) a demandé aux compagnies de réduire leurs programmes de vols de 40%. A l'origine : une grève des contrôleurs aériens déclenchée par le deuxième syndicat d'aiguilleurs du ciel, l'Unsa-ICNA (17% des voix aux dernières élections professionnelles) pour réclamer de meilleures conditions de travail et des effectifs plus importants, avec l'appui de la troisième force syndicale de la profession, l'Usac-CGT (16%).
Selon l'Aviation civile, le taux de grévistes s'est établi à 26,2% jeudi, 272 contrôleurs ayant pris part au mouvement sur le millier de personnels de service. Selon les griefs de l'Unsa-ICNA, ils protestent contre "un sous-effectif entretenu et responsable des retards une bonne partie de l'été" mais aussi "un management toxique, incompatible avec les impératifs de sérénité et de sécurité exigés". Dans ses tracts, le syndicat répète aussi son opposition à la pointeuse biométrique, principale source de la colère actuelle. Ces motifs de grève ont été jugés "inacceptables" par le ministre des Transports Philippe Tabarot.
Une réforme pour faire pointer les contrôleurs
Une réforme contestée est en effet en cours pour établir un pointage des contrôleurs à leur prise de poste. Il s'agirait de déployer des "pointeuses numériques" et des "badgeuses sur position", décrit le magazine Challenges. "Les premières permettent de savoir à quelle heure arrivent les contrôleurs sur leur lieu de travail, et les deuxièmes, de savoir exactement où ils sont", poursuit l'hebdomadaire. Des changements que l'administration prévoirait de déployer sur les lieux de travail des contrôleurs "entre l'hiver 2025 et la fin de l'été 2026", rapporte la Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat.
Cette réforme fait suite à un "incident grave" à l'aéroport de Bordeaux, quand deux avions avaient failli entrer en collision. Le 31 décembre 2022, dans la matinée, un A320 d'EasyJet avait été autorisé à atterrir sur la piste 23, le contrôleur aérien ayant "oublié" la présence d'un petit avion de tourisme DR400 sur ce même seuil de piste. "Le pilote du DR400 ayant compris que l'A320 était autorisé à atterrir s'est signalé au contrôleur, qui a immédiatement ordonné à l'A320 d'interrompre l'approche", raconte un rapport d'enquête du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA). L'avion d'EasyJet a finalement survolé l'autre appareil à seulement 54 m de distance.
De quoi lutter contre les "clairances"
L'enquête en question a fait peser la responsabilité sur une organisation défaillante du travail des aiguilleurs, en dehors du cadre légal et sans respect du tableau de service. Il prévoyait en effet "six contrôleurs" présents, mais "le chef de tour avait, en accord avec son équipe, modifié à la baisse les effectifs prévus à trois contrôleurs à l'heure de l'incident grave", peut-on lire, augmentant la charge de travail des personnes sur place ce matin-là. En conclusion, le BEA recommandait d'équiper "les centres de contrôle d'un moyen automatique et nominatif d'enregistrement de présence des contrôleurs sur position et sur le lieu de travail", défendant un "élément essentiel à la sécurité de la circulation aérienne".
Cette recommandation, selon le BEA, pourrait lutter contre une situation "connue et tolérée implicitement" dans le secteur. "Un consensus social, ancré depuis de nombreuses années (...), laisse perdurer une situation dans laquelle les équipes de contrôleurs organisent, en dehors de tout cadre légal, un niveau d'effectif présent généralement inférieur à l'effectif théoriquement déterminé comme nécessaire." Une pratique appelée les "clairances". "C'est le chef de poste de la tour qui accorde sa journée ou sa demi-journée à un collègue s'il estime que la charge de travail ne justifie pas la présence d'autant d'agents", et ce "sans que cela soit comptabilisé dans son temps de travail", traduit Capital. "Cette pratique est aussi opaque que surprenante", juge la commission sénatoriale.
A tous ces arguments, les syndicats dénoncent l'"instrumentalisation" du rapport du BEA et estiment être "fliqués". "Les contrôleurs sont garants de la sécurité du trafic aérien dans des conditions de plus en plus complexes, en raison de l'augmentation constante du trafic, des pannes récurrentes et de l'incompétence managériale totale à anticiper le sous-effectif et à gérer la modernisation technique. Pourtant, ce sont bien les contrôleurs qui voient leur professionnalisme remis en cause", dénonce l'Unsa-ICNA, selon qui "la pointeuse suscite un rejet massif au sein des organismes". "Les agents n'ont pas besoin d'être infantilisés ou suivis à la trace pour faire correctement leur travail", conteste à son tour un contrôleur aérien interrogé par TF1. De son côté, le premier syndicat d'aiguilleurs du ciel, le SNCTA (60% des voix), n'a pas appelé à la grève.
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