Festival d’Avignon 2025 : Thomas Ostermeier peine à convaincre avec "Le Canard sauvage" d'Ibsen

La pièce de Henrik Ibsen, adaptée et actualisée par le metteur en scène allemand, demeure très académique.

Mohamed Berkani

France Télévisions - Rédaction Culture

Publié le 07/07/2025 17:05

Temps de lecture : 3min

Scène de "Le Canard sauvage" de Henrik Ibsen, mise en scène de Thomas Ostermeier. (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

L'Opéra Grand Avignon est bondé, samedi 5 juillet, pour la pièce de théâtre Le Canard sauvage de Henrik Ibsen, mise en scène par Thomas Ostermeier. "C'est à Avignon et nulle part ailleurs, un théâtre plein pour une pièce de trois heures en allemand ! Et c'est Ibsen, rien de joyeux. Et en plus, il faut regarder les comédiens et lire les surtitres. Aucun doute, on est à Avignon", dit, un brin admiratif, un spectateur à sa voisine.

Hochement d'acquiescement de la tête. Dans la salle, le bermuda a supplanté le pantalon. Il fait plus de 35 degrés à l'extérieur.

La nouvelle création du metteur en scène allemand était très attendue. Le dispositif est assez astucieux : un plateau tournant permet de passer d'un salon bourgeois à un atelier-maison modeste.

D'un côté de riches propriétaires industriels, et de l'autre la famille d'un médiocre photographe lancé depuis plusieurs années dans l'invention de quelque chose de révolutionnaire. Il ne sait pas encore laquelle, lui, l'inventeur de génie, hanté par le passé. Père d'une fille atteinte d'une maladie des yeux, Hjalmar Ekdal est un optimiste multirécidiviste. En apparence, et jusqu'à l'arrivée de Gregers.

Gregers, l'ami qui vous veut du bien

Cette pièce, écrite en 1884 et revisitée par Thomas Ostermeier, résonne fort avec le présent. Quelle est la place de la vérité ? Et celle de la réalité alternative ? Toute vérité est-elle bonne à dire à l'ère des fake news ? En devenant populaire, l'artiste reste-t-il lui-même ? L'art est-il forcément engagé, authentique ? Le Canard sauvage est une pièce à tiroirs.

En revenant chez lui après une longue absence, Gregers Werle déterre le passé peu reluisant de son père. Un père peu aimant, occupé à multiplier les aventures amoureuses et à accroître sa richesse. Pour atteindre ses objectifs, il délaisse femme et enfant, et accuse son associé de détournement de fonds. Et quand le jeune idéaliste découvre les raisons de son père pour aider la famille de son ancien associé, il décide de faire éclater la vérité. Et de vivre sans rien cacher désormais.

Scène de la pièce "Le Canard sauvage" d'après Henrik Ibsen, mise en scène par Thomas Ostermeier. (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

La famille Ekdal vivait dans le mensonge, heureuse. Ses membres ont trouvé un équilibre épanouissant dans le non-dit. C'est cet équilibre précaire qui vole en éclats quand Gregers, dangereusement candide, cherche à imposer la vérité absolue comme mode de vie. La dictature de la vérité. Les secrets de la famille Ekdal sont étalés au grand jour. En réveillant et révélant le passé, Gregers ne se doutait pas du dénouement tragique.

Malgré des trouvailles scéniques, un honnête jeu d'acteurs, Le Canard sauvage, version Thomas Ostermeier, ne décolle pas, laissant les spectateurs sceptiques.