Trois bonnes raisons de voir l'éblouissante mini-série coup de poing "Adolescence" sur Netflix
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Ce thriller psychologique en quatre épisodes est l'uppercut de ce début d'année. Voici pourquoi il ne faut pas le louper.
Ça démarre au quart de tour, lorsqu'une unité de policiers enfonce la porte d'un pavillon de banlieue anglais, à l'aube, et procède à l'interpellation musclée, dans son lit, de Jamie Miller, 13 ans, pour le meurtre d'une adolescente qui fréquente le même collège. Effarés, ahuris, son père, sa mère et sa grande sœur sont persuadés qu'il y a erreur. Avec son visage poupon constellé de taches de rousseur, Jamie, à peine sorti de l'enfance, n'a pu commettre un tel crime.
Co-créée par le scénariste Jack Thorne (Skins, Shameless) et l'acteur Stephen Graham (The Chef, Boardwalk Empire), Adolescence est une mini-série britannique percutante en quatre épisodes d'environ une heure chacun, à voir sur Netflix depuis le 13 mars. Attention, cet article comporte du divulgâchage.
Elle nous plonge tête la première dans l'enquête criminelle, mais aussi dans le chaos et le cauchemar de la famille du suspect confrontée à l'impensable. Débutée comme une série policière, elle se mue rapidement en drame psychologique et social.
Un bijou remarquable pour au moins trois raisons.
Pour la prouesse technique
Ce n'est pas sa seule qualité, loin de là, mais on ne peut passer sous silence la prouesse technique d'Adolescence : les quatre épisodes de la série ont été intégralement tournés en plan-séquence. Ils consistent donc chacun en un plan ininterrompu d'une heure, sans raccord ni montage. Le but n'était pas de faire le malin, mais d'empêcher le spectateur de détourner le regard, assure le réalisateur Philip Barantini, déjà aux commandes de The Chef (2022), un film de fiction tourné en un seul plan dans les cuisines d'un restaurant gastronomique au moment du coup de feu.
Le procédé donne une intensité exceptionnelle à la série : il nous tient en haleine, immergé dès la première minute, incapable de lever le nez de ce drame qui se déroule sous nos yeux comme en direct.
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Car la caméra bouge beaucoup, surtout durant les deux premiers épisodes. Elle suit par exemple un protagoniste à pied, puis bifurque lorsqu'il en croise deux autres et embarque avec ces derniers en voiture, avant d'entrer avec eux dans une école, et cela, en permanence. La fluidité est si époustouflante dans le second épisode que l'on en vient à s'interroger sur la façon dont l'équipe a travaillé.
De fait, il s'agit d'une chorégraphie ultra minutieuse, à la fois des acteurs, mais aussi de la caméra, qui passe de main en main de façon virtuose à certains moments clés, et s'envole même une fois à bord d'un drone. Cela a nécessité non seulement de longues répétitions, mais aussi la construction des scènes en miniature pour déterminer à l'avance où se positionnerait la caméra. Car cette dernière ne reste jamais statique et mène un ballet incessant entre les acteurs, au plus près d'eux, y compris dans les scènes se déroulant à huis clos, comme au troisième épisode, dans le tête-à-tête hyper tendu dans un centre de détention entre Jamie et la psy chargée d'évaluer son discernement.
Pour le jeu des acteurs, extraordinaire
Dans cette série, tous les acteurs, du premier ou dernier, sont exceptionnels et bouleversants. Mais Owen Cooper, 15 ans, qui joue Jamie, est tout simplement impressionnant. Choisi parmi 500 candidats, il n'avait jamais joué auparavant. Il faut le voir interpréter tour à tour l'anxiété, la colère, la fraîcheur juvénile et la violence, en particulier dans le face-à-face d'une tension inouïe avec la psychologue dans l'épisode trois, pour comprendre qu'il est promis à un brillant avenir.
Cependant, tous les comédiens sonnent juste. Stephen Graham, qui est aussi l'initiateur, le co-auteur et le co-scénariste de la série, joue le père de Jamie. En plombier qui trime à déboucher des toilettes jusqu'à 21h pour payer les traites du pavillon familial, il est remarquable d'expressivité et de retenue. D'abord dans le déni, puis en détresse, il est inoubliable dans la scène d'introspection finale.
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Erin Doherty, vue en princesse Anne dans The Crown, excelle en psychologue qui sonde et affronte le jeune Jamie en tentant de ne rien laisser paraître de ses émotions – cet infime mouvement de paupière qu'on a vu vriller, était-ce involontaire ? Quant à Ashley Walters, il est formidable en inspecteur Bascombe, lui aussi tout en maîtrise apparente alors que son fils, victime de harcèlement dans le même collège que Jamie, va le mettre sur la piste du mobile du crime.
Chaque épisode étant tourné en plan-séquence, les acteurs jouent sans filet : il n'y a pas de possibilité de couper et de reprendre. Personne n'a donc droit à l'erreur : une seconde d'inattention et c'est tout l'épisode qui part à la casse. Les comédiens se tiennent donc sur un fil, mais sur un fil solidaire, tous ensemble, devant donner leur meilleur à chaque seconde. Et ils le font.
Parce que ce sujet grave est traité avec tact
Dans Adolescence, il est question de réseaux sociaux, de harcèlement et de leurs ravages, ici la faible estime de soi et la difficulté à contrôler ses frustrations. Elle évoque aussi la montée préoccupante des thèses "masculinistes" chez les jeunes. Il y est notamment question des "incels" (involuntary celibate, célibataire involontaire en français), une communauté misogyne en ligne d'hommes qui, se sentant rejetés par les femmes, iraient jusqu'à prôner la violence à leur encontre.
La série n'est pas inspirée d'une histoire vraie, mais d'une série de meurtres au couteau de jeunes filles par des adolescents, survenus en Grande-Bretagne ces dix dernières années. La recrudescence de ces faits divers a interpellé le co-créateur et acteur d'Adolescence Stephen Graham.
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"L'une de nos intentions était de demander : qu'arrive-t-il à nos jeunes hommes ? À quelles pressions sont-ils confrontés de la part de leurs pairs, d'internet et des réseaux sociaux ?", explique-t-il à Netflix, en soulignant que les pressions que subissent les jeunes sont les mêmes partout dans le monde.
À la question "Comment Jamie en est-il arrivé là ?", les épisodes offrent différents points de vue – celui des enquêteurs de police, celui de la psy et celui des parents – mais ne jugent jamais. Visiblement, les auteurs, qui laissent quelques questions en suspens, n'ont pas souhaité offrir une réponse unique, ni pointer du doigt qui que ce soit. Ils préfèrent sonder la société dans son ensemble, et en particulier la faillite des adultes, y compris l'encadrement scolaire, largués face aux réseaux sociaux et à un monde hautement toxique dont ils ne maîtrisent plus les codes. L'objectif des créateurs de la série était surtout d'engager un dialogue intergénérationnel et d'alerter les parents sur le péril que peut représenter aujourd'hui le cocon d'une chambre d'enfant pour la génération TikTok.
"Adolescence", mini-série britannique de Jack Thorne et Stephen Graham. Quatre épisodes d'environ une heure chacun à voir sur Netflix
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