Il y a dix ans disparaissait une légende, le roi du blues B.B. King
Le 14 mai 2015 décédait celui considéré comme l'un des plus grands bluesmen et un guitariste parmi les plus influents à travers les musiques populaires du XXe siècle. Cette année célèbre à la fois les dix ans de sa disparition et le centenaire de sa naissance, en septembre.
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Prononcez le mot "blues", et quelques noms vont instantanément arriver dans la conversation : la pionnière Bessie Smith dont se réclamait Janis Joplin, le légendaire Robert Johnson qui aurait vendu son âme au diable, le héraut de Chicago Muddy Waters dont le titre d'une chanson a donné son nom aux Rolling Stones, et bien sûr le "roi" B.B. King. Ou plutôt, devrait-on dire, l'un des trois rois du blues, car avec Albert King et Freddie King, ils constituaient le trio des "Kings" de cette musique afro-américaine à la source de la plupart des courants musicaux encore en vogue aujourd'hui.
Mais plus que les deux autres, B.B. King a exercé une influence considérable sur moult guitaristes. Son phrasé et son vibrato particuliers lui ont conféré une aura unique chez les aficionados de la six-cordes. Au point que des tutoriels et méthodes d'apprentissage de l'instrument utilisent couramment le terme de "B.B. King box" pour désigner une zone du manche de la guitare, où se jouent les notes pour sonner comme le maestro.
Un style immédiatement reconnaissable
Car le jeu de B.B. King est devenu une référence pour tout apprenti guitariste. Cette façon de tirer sur les cordes donne à la guitare une âme et une sensation de voix humaine. L'instrument semble s'exprimer comme si on entendait parfois des pleurs, parfois des sourires. Une expressivité qui fait écho à la propre voix du chanteur.
"C’était un disque chargé d’émotion dans la mesure où j’ai pris conscience de ce triangle entre le chanteur, la guitare et le public. C’est cette conversation à trois qui m’a fait une énorme impression."
Mark Knopflerà propos de l'album "Live at the Regal" de B.B. King
Le dialogue en forme de "question-réponse" est une figure musicale particulièrement présente dans le blues, et B.B. King savait la manier à merveille, notamment en croisant le manche avec d'autres guitaristes. Dans cette vidéo datant de 1987, il dialogue avec Eric Clapton, un de ses nombreux émules, sur le titre The Thrill Is Gone, titre qu'il a popularisé sur la scène internationale en 1969. À la fin du morceau, les deux musiciens s'en donnent à cœur joie en improvisant chacun en contrepoint de l'autre.
Les exemples de duos du maestro avec d'autres grands de la six-cordes sont légion : que ce soit ses contemporains comme Albert King ou ses successeurs tels Gary Moore, Stevie Ray Vaughan, Derek Trucks... Celui qui laissait croire – à tort – qu'il ne connaissait aucun accord et ne savait jouer qu'en solo a été le modèle pour plusieurs générations de rockers à travers le monde entier.
Car bien qu'il s'en défendait, B.B. King avait étudié la musique et connaissait très bien le solfège, les gammes et la formation des accords. C'est en s'inspirant de ses mentors Blind Lemon Jefferson, T-Bone Walker, Bukka White, et même les jazzmen Charlie Christian et Django Reinhardt, qu'il a su créer son propre langage guitaristique, devenu une référence dans le domaine.
Une guitare aussi célèbre que lui
Le style de B.B. King est indissociable de son instrument qui a acquis au fil des décennies une renommée égale à son maître. La fameuse guitare Lucille tient son prénom d'une histoire survenue en 1949 : lors d'un concert en Arkansas, une bagarre éclate entre deux hommes qui renversent le poêle chauffant la pièce, provoquant ainsi un incendie et l'évacuation de la salle. Une fois dehors, B.B. King s'aperçoit qu'il a oublié sa guitare à l'intérieur et retourne la chercher au milieu des flammes.
Apprenant le lendemain que les deux hommes, retrouvés morts dans les décombres, s'étaient battus au sujet d'une femme prénommée Lucille, il nomme sa guitare de la même façon afin de toujours se souvenir de ne pas agir stupidement dans la vie. Un album de 1968, Lucille, porte le nom de sa guitare.
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À partir de 1958, le bluesman joue exclusivement sur des modèles Gibson ES-335. Mais la caisse creuse lui génère parfois du larsen, et pour pallier cet inconvénient, B.B. King calfeutre l'intérieur de sa guitare avec des serviettes de bain ! Par la suite, Gibson lui fabrique un modèle sur mesure ne comportant pas les ouïes en "f", évitant ainsi l'effet indésirable.
La célèbre marque de guitares électriques propose des exemplaires "signature", offrant la possibilité à tous ses admirateurs de jouer sur un instrument similaire à celui de leur idole. Jusqu'à la fin de sa vie, le guitariste est resté quant à lui fidèle à sa Lucille.
Une vie marquée par le blues
Cette vie, elle a d'abord été sous le signe de la pauvreté et du travail dur. Riley Ben King est né en 1925 et, dès l'âge de 8 ans, a dû travailler dans une plantation de coton, en même temps qu'il parcourait quotidiennement une dizaine de kilomètres pour rejoindre son école. Après avoir chanté dans le chœur gospel à l'église, il a été deux ans DJ dans une radio de Memphis, où il s'est fait appeler "Beale Street Blues Boy", raccourci en "Blues Boy", puis finalement en "B.B." C'est là qu'il a rencontré T-Bone Walker et a découvert sa vocation pour la guitare électrique.
Il n'a ensuite jamais cessé de revendiquer cette âme de bluesman et cette notion de vivre pleinement sa musique et le sens de son message. Des chansons comme Everyday I Have the Blues ou Why I Sing the Blues témoignent de l'attachement profond de B.B. King à ses racines.
"Pour jouer et chanter correctement le blues, il faut l'avoir vécu."
B.B. King
Grâce entre autres au mouvement British Blues Boom dans l'Angleterre des sixties, les bluesmen afro-américains ont pu accéder à une renommée internationale. En 1969, B.B. King joue en première partie des Rolling Stones pendant leur tournée américaine. L'Europe va lui ouvrir grand les portes et il participera à plusieurs festivals de jazz en France, à Vienne ou Nice par exemple.
De nouvelles générations le découvrent dans les années 1980, avec le tube Into the Night, générique du film Série noire pour une nuit blanche avec Jeff Goldblum et Michelle Pfeiffer en 1985. Mais c'est surtout sa collaboration avec U2 sur When Love Comes to Town en 1989 qui le consacre définitivement comme star internationale.
Preuve si besoin en était que B.B. King a su dépasser le cercle des puristes du blues et a rayonné bien au-delà de ce style musical. Une légende de la culture populaire du XXe siècle qui aurait eu 100 ans cette année, et nous quittait il y a tout juste dix ans.
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