Le compositeur et chef d'orchestre Garbis Aprikian, grand passeur de la musique arménienne en France, est mort à 98 ans
Dans son œuvre de compositeur, le musicien avait réussi à marier la musique savante occidentale et les mélodies arméniennes.
Compositeur et chef d'orchestre, le musicien Garbis Aprikian qui a beaucoup contribué à diffuser, en France et au-delà, la musique arménienne, est mort le 15 octobre 2024 à 98 ans, a annoncé à Franceinfo Culture son fils Ara Aprikian.
À la fin du mois de septembre 2024, dans le cadre des Journées arméniennes à la Philharmonie de Paris, une de ses œuvres a été interprétée, en même temps que lui était remise – par l'intermédiaire de ses deux fils – la médaille Grand Vermeil de la ville de Paris.
Depuis le milieu des années 1950, Garbis Aprikian habitait en France où il a mené de front, une vie durant, un parcours de compositeur et d'interprète, chef d'orchestre et chef de chœur, à la tête des chœurs mixtes Sipan Komitas pendant cinquante ans.
Une éducation arménienne en Égypte
Garbis Aprikian est né en 1926 à Alexandrie, en Égypte, un pays alors d'une très grande ouverture culturelle. C'est là que, dans la communauté arménienne, se façonne son univers. "J'ai étudié l'histoire et, avec elle, l'épopée arménienne. Cela n'a l'air de rien, mais ça m'a nourri, ça nous conférait tous une fierté nationale", nous a-t-il raconté lors d'une longue rencontre en 2014. "Avec l'âge, j'ai compris que cette épopée était différente des autres : elle n'était pas dans la conquête, mais dans la défense d'une culture."
C'est à Alexandrie aussi qu'il rencontre un musicien italien en exil, un disciple du compositeur Pietro Mascagni, qui fait son éducation musicale. "C'est à cette époque que j'ai écrit ma première œuvre, un prélude orchestral sur un poème arménien, L'hirondelle", nous raconte-t-il. "Une métaphore du peuple arménien, qui, comme les hirondelles, malgré les destructions, reconstruit toujours son nid…"
Messiaen, une rencontre fondatrice
Mais c'est en France, où il arrive grâce à une bourse en 1953, que Garbis Aprikian parfait ses connaissances et atteint sa maturité musicale. À l'École normale de musique, puis au Conservatoire national supérieur où il fera la rencontre fondatrice d'Olivier Messiaen.
Un maître dont l'influence s'exercera autant "dans la philosophie et l'esthétique musicales" que dans l'inspiration et la technique d'utilisation des folklores nationaux. "De mon côté, j'appliquais son savoir-faire au folklore arménien. Moi, je n'avais pas besoin de magnéto, car j'avais été littéralement nourri des chants folkloriques, populaires et religieux !". Enfin, grâce à Messiaen, Aprikian découvre et embrasse la musique de Wagner, une autre référence de taille.
L'empreinte de Wagner – et notamment celle de Parsifal – est d'ailleurs clairement perceptible dans l'œuvre phare de Garbis Aprikian, La Naissance de David de Sassoun, un oratorio pour solistes, orchestre et chœurs célébrant comme aucun autre l'épopée. "La dimension vocale y est indispensable. Elle est caractéristique de la tradition arménienne, qui la privilégie à la musique instrumentale", nous avait expliqué Garbis Aprikian.
D'ailleurs toutes les variantes de la musique arménienne y sont – prières, chœurs d'enfants, musique chantant la nature, chants guerriers, procession, etc. Sans oublier la dimension de la musique savante européenne, également présente. Comme toujours chez lui, dans ses nombreuses œuvres vocales et instrumentales, la musique est fruit d'un mélange.
Traduction "noble" de la tradition
Son style, le compositeur nous l'avait résumé ainsi. "Mélodiquement, c'est arménien, harmoniquement, c'est occidental. J'ai adapté le savoir-faire occidental aux mélodies nées du folklore arménien. C'est une transcription "noble" de la tradition". Appelée à être compréhensible et appréciable par tous. Autant par les Arméniens que par les autres, en Europe et ailleurs.
Avec la Chorale Sipan-Komitas, il a participé à de très nombreux festivals en France et sillonné l'Europe – Bruxelles, Genève, Bâle, Zurich, Munich, Amsterdam, Venise. Il était invité en 1991, pour la première fois, par les autorités arméniennes à se rendre à Erevan, où il a interprété, lors d'un concert à côté de ses propres œuvres, celles de compositeurs de la diaspora.
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