Témoignage "Il y a eu un vrai tournant" : Katherine O'Keefe, "coordinatrice d'intimité" sur les plateaux de tournage

La profession prend de l'importance depuis le mouvement MeToo et les autres scandales qui ont suivi dans le cinéma. L'Américaine Katherine O'Keefe raconte à franceinfo son métier qui reste encore méconnu pour le grand public.

Article rédigé par Matteu Maestracci
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une caméra de cinéma sur un tournage. (Illustration).  (JÉRÉMIE FULLERINGER / MAXPPP)
Une caméra de cinéma sur un tournage. (Illustration).  (JÉRÉMIE FULLERINGER / MAXPPP)

Un métier de l'ombre mais de plus en plus en vogue depuis le mouvement #MeToo. Les "coordinatrices d'intimité", interviennent sur les plateaux de tournage pour les scènes intimes ou sexuelles. Alors que le Festival du cinéma américain de Deauville se poursuit jusqu'à dimanche 14 septembre, franceinfo a rencontré l'Américaine Katherine O'Keefe. Inconnue du grand public, elle est pourtant une star de sa discipline aux États-Unis.

Si la profession prend de l'importance, elle reste méconnue. Une coordinatrice d'intimité (le métier étant presque exclusivement féminin) s'assure de deux choses dans les films et les séries : que ce qui est tourné est bien ce qui est prévu dans le script mais aussi que les comédiens, et surtout les comédiennes, sont à l'aise avec ce qui est demandé. "Le vrai problème, c'est qu'il est toujours très difficile de parler de sexe de façon professionnelle. Les gens n'ont pas forcément cette compétence, du coup, ils ne communiquent pas", explique Katherine O'Keefe.

Elle prend un exemple : "J'ai travaillé sur une série, une fois, il y avait une scène avec deux personnages dans un placard et le script disait seulement 'ils le font'. Le réalisateur a compris que c'était une longue scène de sexe avec de la nudité, mais les acteurs, eux, juste un baiser un peu intense. Donc la comédienne a été offensée, pensant qu'on profitait d'elle, elle a refusé de tourner la scène."

"Créer un espace de communication"

Aux États-Unis, les coordinatrices d'intimité doivent encore faire face à la perplexité de certaines équipes de films ou producteurs, qui continuent de les voir comme puritaines ou comme une forme de censure. Katherine O'Keefe est basée à Los Angeles et a travaillé sur plusieurs épisodes des séries Grey's Anatomy ou The L world entre autres. Elle confirme que les ambiances sur les plateaux sont meilleures et apaisées, depuis leur arrivée, après l'affaire Weinstein, la vague Metoo en 2017 et autres enquêtes pour viols ou agressions sexuelles dans le cinéma. "Je pense qu'il y a eu un vrai tournant et qu'on s'est habitué à notre présence", assure-t-elle.

"La plupart du temps, quand des scènes intimes se passent mal, c'est parce que des gens sont très mal à l'aise, reprend Katherine O'Keefe. Or, si vous créez un espace de communication, avec un langage professionnel, pour s'assurer qu'ils sont à l'aise avec les scènes avant d'entrer sur le plateau, les choses se passent tout de suite de manière beaucoup plus fluide que si vous allez sur un plateau en vous disant que vous devez vous protéger." En France, après des débuts assez confidentiels, on compte désormais une demi-douzaine de coordinatrices d'intimité, contre plus de 80 aux États-Unis.

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